Entre deux sommeils, moi Jack Rackham, je vogue sur le pont des soupirs et les corps de rêves que j'imagine, laissent place encore à mes souvenirs de jeune homme...
"Le Capitaine Longfellows nous avait mitonné une balade le long des côtes de Heart Island, dans l'océan Indien. Deux mois s'étaient écoulés depuis notre départ de Basse Terre, et j'avais été chargé de faire la cuisine. The Cook, c'était moi et j'avoue que j'aimais ça. Nager dans les provisions et préparer les repas des hommes me plaisait au plus haut point...
La chance avait voulu que dès le premier jour, un placard m'avait livré un livre un peu spécial, intitulé : Book of the Cook and Sorcellery. cookings et enchantments.
J'alternais donc des recettes selon les humeurs et les grès de fortune, qui nous menaient d'îles en pontons. Ce jour-là, je ne sais ce qui me prit, je remarquais un petit alinéa dans un coin : "Only for the Cook." Je me rendais à la page, très loin près du lexique, et détaillais les ingrédients :
"Ouvrir le hublot..." Ce que je faisais et en profitais pour m'aérer d'air salin en manquant me prendre un de ces poissons volants qui atterrissait sur la table. Je le rebalançais à la mer aussi sec, n'étant pas prévu dans la recette...Puis la suite disait " Lancer une poignée de gros sel vers le large et dire l'incantation magique de la page 232." Ce que je trouvais facilement.
Puis rien. Rien ne se produisit. Ou du moins, c'est l'impression que j'eus jusqu'à ce que Sara frappe contre la coque, à côté du hublot. "Que me veux-tu ?" demanda t-elle ?
A vrai dire je ne voulais rien, mais maintenant qu'elle était là, cela changeait tout ! Je m'approchais du hublot et nous fîmes la conversation. J'apprenais son prénom, et plus je la regardais, plus je la trouvais belle. Pourtant, un voile foncé recouvrait une grande partie de son visage et seule une mèche de ses cheveux dépassait comme pour mieux me tenter. Ses iris noirs me scrutaient et j'avais l'impression de tomber dedans comme dans un puit...
Nous parlâmes de tout et de rien, de nos espoirs, de nos peurs, de nos envies...Plus nous parlions, plus je m'approchais et elle semblait acquiescer. Je tentais de l'approcher et ne recula point. Je l'embrassais...Je glissais sa langue contre la sienne et je la sentais frétiller comme un soupir. Sa salive était mienne et nos mains se mirent à s'agiter, comme pour communier d'harmonie de nos sens.
A travers le hublot, nos membres s'immiscaient chacun dans nos habits et nous goûtions nos intimités...nos bouches se fondaient et nul se savait plus quelle langue était à qui. Nos doigts croisaient d'habileté, et nous nous pénétrions de nos regards. Nous faisions l'amour...
La coque du navire s'estompa et nous étions l'un contre l'autre, offerts à nos désirs. Son voile avait disparu et mon fendard laissa ma belle devenir mon fourreau...De sa main, je suivais le chemin d'entre ses cuisses, devenant son amant. Quand soudain...
Un bruit énorme fit trembler tout le bateau et le sifflement strident de ma marmite à vapeur me ramena dans ma cuisine. Les fers en l'air, je fixais le hublot, personne...Je rangeais vite mon gros livre de cuisine et un coup d'oeil panoramique me fit estimer la situation. Un Toc-toc à la porte me fit sursauter et j'ouvris...C'était Mildred le rouquin, un autre matelot.
- T'es là ? Tu vas rire : Le Capitaine s'est payé un banc de sable ! Il dit qu'il a vu une sirène...tu parles, c'est plutôt une bouteille de rhum sur laquelle il a glissé ! Qu'est-ce que t'as ? T'es bien blanc...
- La farine, dis-je. J'ai fait de la pâte pour le pain, aujourd'hui c'est tapas et coquets à la frita !
Mildred s'en retournait ravi et se frottait le ventre en souriant. Je fermais la porte et retournais au hublot. je ne savais plus si j'avais rêvé ou...
Je regardais au large une dernière fois et je fermais le hublot. Je pensais à Sara, à ces moments...Pourtant, j'étais à l'aube de ma vie et je ne voulais la perdre à donner un sens à tout ça. A courir derrière une chimère, si belle fut-elle..."
Je m'appelle Jack Rackham et je m'étire après avoir écrit le dernier mot de mon histoire. En contemplant une mouette qui fait le tour du bateau, je remarque la boucle de cheveux, noire, entourée à mon doigt. Sara, je me souviens...
Mais ça, c'est une autre histoire...
Entre reve et realite... C'est tres sympa; je prefere ta sirene a celles d'Ulysse...
RépondreSupprimerJuste une chose (une sale manie chez moi :s): c'est "sorcery" en anglais! (j'ai honte)
bisous
Merci de ton passage, Karine...Je me suis régalé à l'écrire en tous cas !
RépondreSupprimerEffectivement pour Sorcery, mais j'avais vu dans une BD "Sorcellery".
Bllblebbb...J'invente bien des mots en français, je vais dire que je fais pareil en anglais !
A bientôt, bisous !
Jack
Cher Jack, il s'agit bien en effet d'équilibrisme quand on cuisine sur un bateau. Quant à faire l'amour, la frontière est mince... Que de beaux souvenirs tu m'évoques là...
RépondreSupprimerAh, les souvenirs...Content de te les avoir fait revivre, ils me font penser un peu aux miens aussi, hi hi !
RépondreSupprimerBonne nuit...
Jack
Je débarque dans ton univers, il faut avoir le pied marin chez toi, et l'imagination est au pouvoir. Ca me plait bien. Je reviendrai...
RépondreSupprimerEst ce le vent qui nous pousse d'un blog à l'autre ? Est-ce lui qui nous jette là plutôt qu'ailleurs ? J'aime les histoires de marins, même si je ne fais jamais de bateau, alors je lis, je regarde, je cherche et je trouve un lien vers Ricka qui vit (souvent) dans mon village, et dont j'admire le grand talent. Pour moi, du bord de mes eaux douces, à suivre.
RépondreSupprimerPetite précision, Ricka vit dans le village voisin du mien. J'aime bien les précisions.
RépondreSupprimerMerci pour les précisions, Mère Castor.
RépondreSupprimerLe hasard, alors...Même si je ne suis pas si loin.
Content surtout de vous avoir attiré vers mes textes, ce qui est le but de ce blog !
A suivre et bonne fin de journée.
Jack
PS: C'est vrai que j'ai remarqué Rika pour ses peintures, et son grand talent...
Merci pour votre défense, Maître !! ;-)
RépondreSupprimerJ'ai senti mon sabre vibrer et juste fait une pointe au plancher...Avis aux amateurs qui prendraient racine, d'embêter ma Bérénice !
RépondreSupprimerUn bonjour de femme de marin ( on le reste à vie...)
RépondreSupprimerIl a rêvé d'une sirène, terre fondante sondée jusqu'à la vigie...
RépondreSupprimerEncore...
La grande brune.
Merci Nanou de votre visite, femme de marin !
RépondreSupprimerC'est votre commentaire qui me fait rêver, grande brune...
RépondreSupprimerJusqu'à la vigie ?
Encore...
Jack.
Oui jusqu'à la vigie Jack.
RépondreSupprimerUn rocher en vigie, détaché, isolé... Un écueil à fleur d'eau.
La grande brune.
Merci de l'explication, grande brune !
RépondreSupprimerJ'aurais pu glisser, éperonner mon bateau.
Vous êtes précieuse...
Jack