samedi 26 novembre 2011

Prisonnier des Guerriers Cannibales


Je regardais devant moi, l’œil fixe et détaché. De la boue recouvrait encore une partie de mon corps et je me sentais comme un confit ou dans une sauce, avant un bon repas…

Le chef guérillero gesticulait dans tous les sens comme pour indiquer le maniement des fourchettes et couteaux, ayant fait de moi le plat de résistance des visiteurs malvenus et capturés. Je résistais du mieux que je pouvais et j’avais bloqué mes pensées profondes un jour de printemps au cours d’une escapade champêtre avec l’épicière du village. Je souriais aux images impudiques d’une gourmande aux envies intestines insatiables. Je l’étais tout autant en un ramoneur pirate et des heures durant nous fêtions à notre manière, l’arrivée des premiers bourgeons. Un coït interminable de connivence était ponctué de mes grognements virils et d’un cri strident et continu qui m’assurait du contentement majestueux de mon fourreau aux longs cheveux…

Le crissement des lames contre la pierre ponce me ramena dans la marmite où des guerriers nous avaient plongé mes compagnons d’infortune et moi.  Nous avions été capturés au cours d’un pique-nique crapuleux et seul Bosco avait pu s’échapper avec de grands coups d’épaules de taureau et un démarrage vers la forêt digne des plus grands milers. Je réfléchissais à quelques plans d’évasions même si les frôlements d’Orfée, en visite sur l’île ce jour-là, me troublaient. Sa présence me rassurait au fond de ce chaudron des délices de nous-mêmes et nous nous embrassâmes une dernière  fois de nos bouches goulues et assoiffées de liberté. Je lui fis un clin d’œil pour la réconforter car j’étais bien décidé à quitter le menu de ces guerriers cannibales imprévus dans mon agenda. Je frémissais au destin alimentaire de sa peau douce et rageais contre ce gâchis…

Ses mains habiles aiguisaient sans cesse mon envie de survivre et je lui savais grée de ce soutien moral et plus.  Un des cuisiniers nous recouvrit d’une couche supplémentaire de beurre salé des montagnes et je le pris en estime car dans le concert de nos destinées opposées mais complémentaires, de son onction suprême au milieu de ces légumes et compagnons, il avait compris le rouage essentiel de ma psychologie et ce qui mouvait mon horloge biologique de pirate. 

Le sentiment d’avoir bon goût…

(A Suivre…)

vendredi 18 novembre 2011

Le Secret de Rackham Le Rouge


Je suis bien calé dans ma cabine de Capitaine et je fais le point de mes voyages et aventures, relisant quelques pages et revivant quelques dames…Mon tricorne posé contre le poêle se réchauffe et se repose, il l’a bien mérité. Je suçote mon crayon et lève les yeux au plafond avant de revenir vers ma feuille, pour me nourrir de nouvelles histoires et de nouveaux personnages…

Je sens une transformation habituelle me prendre tout le corps et je me fais mon Cinéma, ressassant quelques films aux titres évocateurs. Mes amours me câlinent et je crois humer encore leurs parfums, émoustillé et amoureux… 

L’atmosphère est magique et tout mon corps se transmute pour retrouver l’extase de l’écriture, la dextérité de la main, l’inspiration des mots…

Je frétille et je sens mes oreilles pousser et ma queue fine balayer le vent de mouches imaginaires.

Je suis prêt à nouveau pour écrire, pour dessiner, pour raconter…


A tout bientôt…

Jack le Pirate

jeudi 10 novembre 2011

Une Bouteille à la Mer...- Par Solveig

 Bien cher Jack

 Une bouteille venue de l’eau m’annonce que, déjà, tu as deux cents ans. Voilà qui réjouirait les moins sages d’entre nous, de savoir qu’à si bel âge le tricorne et le sabre vont toujours de pair et de joie.
 Mon île lointaine suit toujours les rumeurs du monde, s’en effraie parfois. La solitude sied bien à mon caractère sombrement sauvage, moi qui ai su profiter des tumultes vivants, ceux qui balaient les carènes les plus apprêtées, les digues les plus hautes, les forts les plus épais.
Néanmoins, te souviens-tu des temps où, plus jeunes de quelques siècles, nous avons bivouaqué ensemble sur l’île du diable ?

Nul doute que les rochers ont gardé trace de nos histoires, celles que nous échangeâmes au coin d’un feu courtois, intense pourtant. C’est à cette occasion que tu m’appris quelques techniques efficaces pour parvenir en haut des mâts les plus hauts, sans déchoir jamais, plongeant sans hésiter dans les eaux claires de nos mers favorites. J’ai en mémoire la fameuse goélette qui osa mouiller non loin de moi, me permettant d’appliquer ton art, brassant les eaux salées de baisers sans fin, trempant les désert les plus secs d’une sève toujours plus fraîche, comme une orgie d’écume blanche incandescente.
 Bien sûr, aucun navire ne pouvait plus résister à mes assauts…C’est ainsi que je m’en lassais une nuit, me retirant comme une marée d’équinoxe, bien loin, découvrant le sable le plus blanc, le plus pur, si éblouissant qu’on ne peux plus approcher de ma peau sans se brûler les ailes.
Seule, la nuit polaire sait calmer mes ardeurs, l’aurore boréale éclipsant sans peine la lumière solaire qui me rend aveugle à toute raison.

J’ai disparu, décidant de laisser les hommes à leurs ébats, étant tellement déçue par eux, pauvres mortels.
Tu restes l’amiral des mers que je préfère, capable de serrer au près sans perdre de vue la côte, ton cap.
Je te souhaite de vivre les mille prochaines années satisfait des rencontres qui te nourrissent, homme de bel appétit.
 Ne m’en veux pas de ne pas dévoiler ma position, je souhaite encore garder le silence quelques temps, mais accepte ce présent, l’ami qui manquait à ton vaisseau pilote, ce perroquet splendide auquel j’ai appris quelques jolis mots de tes favoris. Il a le don de reconnaître la femme qui ment de celle qui est sincère, crois-moi cela peut t’être utile, à notre époque il devient difficile de démêler la vraie de la fausse.
Il s’appelle Miquel Angelo, oui, c’est son plumage baroque excessif qui m’a inspiré ce nom.
Si tu l’appelles Mickey, je le saurais, et je ne te le pardonnerai pas.
 Bien à toi mon ami,
Solveig qui t’embrasse comme tu sais que je sais le faire.


 La Canicule a retenu longtemps entre des rochers cette bouteille de Solveig, libérée par les premiers frimas de l'Automne...Je vous la livre aujourd'hui, intacte. Grand merci à la moussaillonne...J.R.