vendredi 25 novembre 2016

La Femme imaginée



La feuille blanche est là qui me nargue comme une effrontée et je rentre la tête dans les épaules, froissant l’arrière de mon tricorne et ma vanité. Les idées sont notées, le chemin de fer siffle à mes oreilles comme une bouilloire vivante, je tiens le corps du récit comme une sacripande et je fais glisser mes doigts cornus plein de chatouilles maladroites pour faire frétiller la sirène de mes mots coincés quelque part entre les méandres de ma trouille inavouée.

Soudain, je sens un souffle ami sur ma joue hirsute, grelotant de l’insolitude agréée et je romps aussitôt ce vœu de silence inconscient lâchant les flots d’inspiration contenue tel un réservoir renversé à grands flots dans un jardin de bonne terre…

Elle m’a apaisé et je la regarde par-dessus mon épaule, esquissant quelques traits d’abord, la prenant pour modèle telle une muse de mon talent enfui puis retrouvé. Ma main glisse sur les contours de sa forme, intelligente et belle comme une œuvre complète, originale et hors du commun.

Le dessin est à sa gloire, je la regarde encore un peu, pour m’en régaler sans la consommer ou la déranger. L’instant d’un clignement d’yeux pour mieux la graver dans ma mémoire.

La femme imaginée..