mardi 27 septembre 2011

Actrice

 Un vent souffle sur mon pont, celui du Cinéma...

 Des sièges rouges parsemés au milieu de ma goélette accueillent les spectateurs qui s’enfoncent dans les travées puis choisissent le fauteuil à bascule qui les projettera  dans l’espace-temps de la toile magique. 

 Comme éclairant la porte d’une belle histoire, le film nous emporte en un tourbillon de dialogues et de silences, puis on s’y engouffre les yeux émerveillés pour faire connaissance des personnages qui entament leur ballet. Une musique habille en touches de piano les moments et les humeurs, et on remarque les sympathiques et les méchants, les premiers et les seconds rôles.

 Celui-là est cocasse, et l’autre est sans attrait, et on enfile parfois un de ces costumes en guise de héros.

 Puis soudain, il y a quelque chose. Celle-là est différente…

 Capitaine au long cours du Cinéma, je me souviens des débuts de  Juliette, Karin ou Emmanuelle, et je revois ce quelque chose…Je rajuste mon tricorne, n’osant y croire, puis le rejette en arrière soufflant et marmonnant. Je ne tiens plus en place et m’approche de l’écran, claquant des doigts pour un arrêt sur image, c’est mon ponton après tout !

 Sa peau blanche ourlée de grains l’habille en princesse de conte de fée sortie d’un vaisseau spatial où elle combat une faune hostile des pétards plein les mains ! C’est l’âme de Sigourney que je vois devant moi, crinière au vent et sourire de velours aux dents prêtes à croquer.

 Une scène plus intimiste nous dévoile son âme. Elle susurre, elle articule, elle ponctue puis chuchote. Sa bouche semble irréelle, ses lèvres dessinées d’une main de maître. Son regard circulaire donne du temps et du volume à son texte, faisant craquer mon tricorne qui s’écroule en tapon derrière moi, conquis…

 J’imagine pour elle un destin immense, fait de marches et de statuettes mais aussi de ces rôles qui laissent traces pour toujours sur la toile blanche. Les futurs Casablanca, Alien, Patient Anglais ou Annie Hall n’auront bientôt d’yeux que pour elle, j’en fais le pari, foi de Capitaine !


 La salle imaginaire se vide mais je reste un instant pour savourer une derrière image de Carine…



A mon amie et actrice, Carine Jaussaint

Jack Rackham.
* A qui je souhaite les plus beaux rôles et succès, dussé-je les écrire moi-même…^^

Photo Carine Jaussaint par Flavio Pedrotti Moser.

lundi 12 septembre 2011

La Dernière île

Je me suis souvent demandé si à l’aube de mes dernières salves et abordages, je saurais tirer ma révérence et prendre pénates quelque part comme le font les vieux éléphants avant de rendre leur dernier soupir. Une petite île où je poserais mes vieilles défenses pour respirer quelques derniers instants de sérénité avant de rejoindre l’éternité et le ciel des pirates de légende…

Je rejoindrais les Barbe-rouge et Jack Sparrow, et partagerais avec eux quelques parties interminables de cartes. Le goût du rhum aurait sans doute une saveur rance de ne plus avoir de combats à mener et j’imagine à peine la vie sans courtisane à faire sauter sur ses genoux ou à balancer dans mon hamac.

L’heure est venue et ma pirogue s’est échouée sur un banc de sable pour toujours, et je rejoins la cabane aménagée pour mes derniers instants. Le rhum est goûteux et je me suis installé devant le perron pour regarder le ciel bleu parsemé de mouettes égarées ou curieuses. Je repense à toutes ces années de vie bien remplie, de gloire et de conquêtes, ressassant ivresses et chagrins, victoires et redditions. Les baies de l’arbre à fruit que je touche du bras dégage un parfum subtil et agréable que j’hume sans reconnaitre mais mon esprit s’envole en rêveries et j’esquisse un sourire que je reconnais…

Un point au fond de la plage déserte grossit comme ma curiosité et je scrute incrédule la magie du soleil reflétant sur le sable. Une belle indigène balance sa croupe en s’approchant de moi et je revis, oubliant ma retraite et ma fin d’éléphant. Ma vigueur me fait signe et des idées me passent pour assouvir cette faim bien naturelle, je me lève vers ma proie et j’oublie les présages de ma fin, redevenant jeune homme.

Je tends une main vers mon repas de chair, et la belle fait de même caressant ma joue hérissée de mon envie…

Je vois Bosco qui me claque à nouveau, et qui hurle à mes oreilles.
« Capitaine ! Capitaine ! Voilà ce que c’est de s’endormir au soleil sans tricorne... »
Je me redresse et me souviens du rhum de midi et de la balade en mer avec ces personnes du troisième âge. Faut bien gagner sa croûte !

Un petit texte de rentrée après quelques vacances, besos à tous (et toutes ) !
Jack Le Pirate :)