vendredi 30 décembre 2011

Le Retour de Marty McFly


L’œil plongé sur la lentille de ma lorgnette, je parcourais le monde et surtout le ponton supérieur de la goélette où Sandra, ma visiteuse naturiste, prenait un bain de soleil. C’était un soleil un peu frisquet car l’hiver des Caraïbes avait jeté son manteau sur l’île du Crâne, mais je réglais le point sur le corps nu où dépassaient deux tétons diablement érectiles…

Un bruit de crissements de freins surgis d’on ne sait où me fit sursauter et je perdis le fil de Sandra et ses mamelons. Un nuage de fumée avait partiellement recouvert le pont du bateau et je m’approchais à pas de loup (de mer) vers un drôle d’objet métallique qui apparaissait peu à peu. 

« Doc ? C’est vous Doc ? »  Lança un jeune homme à la veste bariolée qui ressemblait à un gilet de sauvetage. Je répondais par la négative et se prenant la tête dans les mains, le dénommé Marty s’assit sur une marche d’escalier d’un accès au poste de pilotage, décrétant : « C’est foutu alors… »

Il me raconta alors, sans s’arrêter, une drôle d’histoire d’engin voyageant dans le temps et de plutonium volé à des terroristes libyens. Je connaissais un peu les voyages spatio-temporels grâce à mon hamac très spécial, et je compris peu à peu les soucis du jeune homme. Je lui proposais d’essayer de redémarrer l’engin mais il fit mine que c’était impossible et se renfrogna aussi sec. Je grimpais dans ce qu’il appelait une voiture et regarda un peu les tableaux lumineux, voir si mon intelligence de pirate y trouvait un sens. 

Soudain, mon attention fut attirée sous le volant par un post-it fraîchement collé où était inscrit « Réserve ». Appuyant sur le bouton à côté, je comptais bien triomphant annoncer la bonne nouvelle à Marty quand machinalement, je tournais la clé enfoncée dans le corps du volant (une habitude gardée de quelques voyages futuristes). Un vrombissement vit vibrer tous mes os, la goélette et toute l’île du Crâne réunis !

J’aperçus en un coup d’œil une date sur le tableau de bord que je connaissais bien et fit monter en pression l’engin. Ça me plaisait bien d’essayer cette machine à voyager dans le temps au fond, et d’un grand coup d’accélérateur, je filais dans le ciel vers l’inconnu….

Une sorte de grand boum électrique me projeta dans un ciel que je ne connaissais pas, du moins sur le moment. Je vis un petit port qui me rappelait quelque chose et sur la route de pierres qui menait jusqu’à une presqu’ile abandonnée, j’aperçus un équipage à vélo où une grande bringue pédalait comme une forcenée, avec sur son porte-bagage un jeune garçon que je reconnaissais.

C’était le jeune Jack Rackham, les yeux ébouriffés des fesses en mouvement de son amie Katia, qui filait vers son île au trésor…


Jack Rackham

*
RETOUR VERS LE FUTUR est un film de Robert Zemeckis, coécrit avec Bob Gale, sorti en 1985. Il raconte l’épopée d’un vieux savant (Christopher Lloyd) et d’un jeune lycéen (Michaël J.Fox) parcourant le temps entre 1955 et 1985, à bord d’une De Lorean améliorée…L’occasion pour le jeune Marty d’assister à la rencontre de ses parents mais aussi à la naissance de sa maison natale et à la montée du Rock’N Roll !!

Il existe deux suites à ce film initial, sortis en 1989 et 1990, faisant voyager nos héros dans le futur de 2055 et au Far-West. Films cultes, ils sont truffés de répliques célèbres telles : 

« Des routes ? Là où on va, on n'a pas besoin de routes. »
« Mais Doc, vous m’aviez dit de ne toucher à rien, que ça pouvait bouleverser tout l’équilibre spatio-temporel ? – Je me suis dit, on s’en balance… »
« Pourquoi une De Lorean ? Quitte à voyager dans le temps, autant le faire avec une voiture qui ait de la gueule ! »
« Tous des ratés les McFly…(…) Et bien, quelque chose me dit que l’histoire, elle va changer… »

Première vidéo sur le blog Rackham, pas étonnant que ce soit pour ce film culte !


samedi 24 décembre 2011

Un Etrange Noël du Capitaine Jack Rackham


Le 24 décembre de chaque année, je suis souvent à  rêvasser dans mon fauteuil à bascule, ressassant les souvenirs de ma vie. Ma retraite de flibustier sur l’île du Crâne laisse épancher mon cœur en certaines occasions et Noël s’y prête encore plus que toute autre.  

Les amis disparus ressortent de leurs cercueils et les chagrins se mouchent dans le lin blanc de ma chemise du dimanche. Je balance en un va-et-vient de sentiments profonds et quelque chose ou quelqu’un semble me manquer comme un verre de rhum à un mourant.

J’avais dans mes jeunes années le souvenir enfoui d’un voyage près des côtes californiennes. Je ne sais si Christophe Colomb venait de découvrir l’Amérique mais nous avions bel et bien jeté l’ancre au large de San Diego pour y rejoindre en escouade le lieu-dit de rêves et de magie appelé « DisneyLand » !

Un certain monsieur Disney, Walt de son prénom, avait créé un parc d’attractions mettant en scène de nombreuses créations et héros d’aventures. Malgré une préférence marquée pour Zorro et son fidèle coursier Tornado, je me laissais entrainer par le reste de l’équipage de ma promotion vers les Mille et unes nuits, univers d’Alladin et ses tours de passe-passe.

Une danseuse voilée, elle marchait en zigzag, jeta son dévolu sur mon tricorne et ma jeunesse et je fus invité à lancer au gré du vent une formule magique pour avoir accès à sa demeure secrète et sa croupe fleurie. Un mot erroné ou une syllabe écornée me fit rater la belle pour me laisser écraser par un fauteuil cossu. Heureusement, quelques bons camarades relancèrent  le sortilège pour me parachuter vers Tarzan et quelques guenons en manque de chaleur humaine dans leur jungle. Mais ceci est une autre histoire…

Je balançais songeur, tâtant mon sabre à l’idée d’une vengeance, quand la soubrette qui astiquait le sol de ma cabine et tendit vers moi un boitier que je reconnaissais.

« Une bonne pipe » pensais-je en mon for intérieur. « Voilà ce qui me manquait ».

Je laissais la jeune femme préparer son culot et goûtais à plaisir son cadeau de Noël…

Puf ! Puf… 


Joyeux Noël à toutes mes moussaillonnes ! ♥
Besos, Jack.

dimanche 18 décembre 2011

La Fille aux Bas Nylon


C’était un samedi soir sur le port du centre et l’Ile du Crâne vivait alors au rythme des macumbas qui s’agitaient au Poca Hontas, la seule boîte ouverte en cette période aux Caraïbes…J’avais mis mon tricorne des dimanches et je tournoyais avec la clientèle féminine afin de retrouver mon pied marin et mon déhanché de fêtard. Cameron m’avait fait la surprise de venir passer le week-end, au grand dam de Tim, et la voir se démener au milieu de la piste faisait plaisir à voir. J’imaginais encore nos nuits d’osmose spatio-temporelle et l’eau me revint à la bouche de ses caresses et autres…

Je lui souriais de temps en temps en agitant une main évocatrice, revenu au comptoir où je scrutais la salle comme un périscope. J’étais sur le point de rejoindre mon hamac et mes pénates un peu assourdi par un brouhaha musical, quand j’aperçus cette fille qui portait des bas qui n’étaient point de contention. Sa danse chaloupée envahissait l’espace et ses yeux projetaient des feux à appeler tous les marins du monde pour une partie de poker jusqu’au bout de la nuit…

Je m’approchais à pas de loup, en entamant une danse d’indiens apprise à mon retour de New Delhi, à Karachi. Une soirée dans un cabaret privé que je n’avais pas projeté mais qui marqua ma jeunesse d’apprenti…De quelques pas en canard, je m’approchais de la fille quand Lady Ania coupa ma route par un rock endiablé que je ne lui connaissais pas. Prenant ma main et la direction des opérations, nous tournoyâmes comme des toupies et j’eus de la peine à garder dans ma mire la belle inconnue aux bas Nylon.

Ania était une sacrée attachée de presse cordiale et tout mais sa fougue et ses jambes interminables m’avaient ensorcelé. Je la remerciais pour la danse, exténué mais vivant puis reprenais le chemin de mon inconnue. Je croisais alors Maia, ma petite sorcière rouquine qui avait fêté la sortie de son nouveau Grimoire, et m’entraina dans une volupté de slows langoureux où nos membres se mélangèrent et je ne sus à la fin si j’avais bien tout récupéré ce qui m’appartenait…

Puis ce fut le tour de Cameron qui s’agrippa en m’enfourchant comme un canasson et malgré l’expérience des rodéos appris avec Buffalo Bill au cours d’un voyage en Amérique, elle ne décrocha point jusqu’à l’extinction des feux.

Penaud, je rentrais seul sur ma goélette endormie. Quand j’aperçus soudain une paire de bas au bas de mon hamac, mais la pénombre ne me permettait pas de distinguer le visage de sa propriétaire qui me fit signe de m’approcher, de son doigt en crochet…

Je sentis juste son souffle m’inviter à de plus intimes présentations, et je me régalais du goût de son rouge à lèvres quand je l’embrassais fougueusement.

Un croui croui complice nous accompagna toute la nuit mais partie au petit matin, je ne sus jamais si c’était elle qui l’avait passée avec moi.

Cette fille aux bas nylon…

lundi 12 décembre 2011

La Belle et le Pirate


Elle a atterri un jour sur mon ponton, telle une mouette aux ailes blanches glissant sur le plancher givré de nos conversations, brodant des accents de chatte miaulant sur un toit brûlant…Nos feux de croisements allumaient nos goûts en Cinéma et ce fut une ronde de pellicules défilant sur l’écran noir de nos vies ! La belle dégageait une belle assurance qui me plut, et mon tricorne avait du détourner son regard de son quotidien aux accents crépusculaires...

Nous prîmes l’habitude d’échanger nos mots et nos tourments, balançant sur un pont ensoleillé nos balles, comme dans une partie de squash interminable où personne ne désirait vraiment gagner la partie, préférant jouer encore et encore jusqu’à la fin des temps. Ses yeux en amande ébouriffèrent aussi mon sourire de pirate et voguant d’île en île, nous eûmes idée de prolonger le lien en jetant une ancre à nos rêves.

Tel un chapiteau de Cinéma, quelques pierres commencèrent la bâtisse que nous agrémentions à souhait de jour en jour. Histoires de quatre chemins et billets à quatre mains, pelletées de dessins et bulles en quatrain, conversations universelles et projets de demain, autant de pelletées de terre qui cimentent cette maison de nos projets et nos rêves... 

Parfois métamorphosés en personnages imaginaires, on partage quelques pâtes en frétillant les oreilles, engloutissant bout à bout un spaghetti géant jusqu’à ce que ce que se frôlent nos truffes en guise de pacte à nos aspirations !

Besos à la Belle qui lira ce billet…

Jack

jeudi 1 décembre 2011

La Marmite à remonter le Temps


La forêt observait de drôles de scènes entre les lianes, les troncs, et toute la mangrove foisonnante. Les guerriers cannibales allaient et venaient les bras pleins de légumes et assortiments de plantes aux saveurs embaumantes, pour les plonger dans le grand chaudron où nous étions plongés dans la pénombre de notre avenir incertain…

Finir dans l’assiette d’un sauvage n’était pas la fin que j’avais prévu à votre serviteur pirate et Capitaine. Non, j’avais imaginé un combat à la lame et aux pistolets durant plusieurs soleils et agonisant dans une mare de sang mélangé à celui de cinquante ennemis. Je fouillais mes poches sous l’œil de mes moussaillonnes fidèles, Victoria, Rosée du matin et Aurélie, pendant qu’Orfée me prodiguait des massages hongkongais en levant la tête de temps à autre, pour me dire, haletante :
« J’te fais pas mal au moins ? »

Son abnégation et son air candide me donnait responsabilité dans sa dernière chance de survie que je concoctais peu à peu sous mon crâne. Je fouillais mes poches pour y retrouver cette poudre magique aux effets immédiats que m’avait offert contre un service mon ami le Magicien.

« Saupoudre bien chaque outil, objet et coffre pour leur conférer pouvoir et mécanique, que ton esprit concentrera au moment du sortilège. » S’ensuivrait quelques formules que j’avais apprises à ce moment-là et l’envie de m’évader de ce guet-apens dînatoire me les rappela instantanément.

Tous les hommes et occupants de la marmite se calèrent contre ses parois, laissant les légumes et aromates flottant au milieu du bastringue. Et mes moussaillonnes  se calèrent contre moi, les yeux grands ouverts…Je balançais en tournoyant quelques poudres qui transformèrent l’endroit en vaisseau et quelques hublots poussèrent par enchantements, sous les « Oh ! » de tout l’équipage du Poséïdon. Quelques pincées firent à mon endroit de moi le poste de commandement et je fis mentalement vrombir les moteurs. Le tour avait marché…

Ce fut Victoria qui prit les commandes à son grand émoi et nous démarrâmes d’un coup sec vers le ciel de lianes qu’on transperça illico, sous les yeux éberlués des indigènes. Rosée puis Aurélie se disputèrent le gouvernail au grand dam de Victoria, pendant qu’Orfée plus partageuse tapa sur le clavier du tableau de bord quelques mots d’amour, ce qui eut l’effet de faire un nouveau plein de kérosène du réservoir, que les premiers milliers  de kilomètres dans l’espace avaient asséché.

Nous profitions de cette rémission de nos destins mortuaires, et Mildred servis quelques pintes d’un sortilège oublié pour fêter le retour à notre bercail. Mais nous n’avions pas fait encore bretelle vers les Caraïbes, que nous aperçûmes au travers d’un hublot la trace d’un balai volant qui s’interposa à notre chemin puis se posa sur la marmite spatiale. Ouvrant le couvercle en poussant un grand cri de rage, c’était Maia qui pénétrait dans notre vaisseau :

« Je vous y prends mes lascars ! J’ai croisé des sauvages qui m’ont raconté l’histoire, et je ne sais ce qu’à inventé Jack pour conter fleurette non grata à ses moussaillonnes. N’empêche, je vous l’emprunte ce soir car j’ai organisé une petite sauterie à la maison … »

Victoria me lâchait, penaude et je grimpais sur le balai de Maia à califourchon derrière elle. Nous filions dans le ciel au rendez-vous d’une soirée que j’imaginais déjà, quand je dis à ma petite sorcière rouquine que je prenais les commandes.

« Je sentais bien que tu en avais envie… » Lâcha t-elle.

Le balai volant fila encore plus vite, collés l’un contre l’autre et souriants de notre tour joué, au firmament de nos aventures…


Jack Rackham.  
(Fin de la deuxième partie de l'histoire commencée sous le titre"Prisonnier des Guerriers Cannibales")

samedi 26 novembre 2011

Prisonnier des Guerriers Cannibales


Je regardais devant moi, l’œil fixe et détaché. De la boue recouvrait encore une partie de mon corps et je me sentais comme un confit ou dans une sauce, avant un bon repas…

Le chef guérillero gesticulait dans tous les sens comme pour indiquer le maniement des fourchettes et couteaux, ayant fait de moi le plat de résistance des visiteurs malvenus et capturés. Je résistais du mieux que je pouvais et j’avais bloqué mes pensées profondes un jour de printemps au cours d’une escapade champêtre avec l’épicière du village. Je souriais aux images impudiques d’une gourmande aux envies intestines insatiables. Je l’étais tout autant en un ramoneur pirate et des heures durant nous fêtions à notre manière, l’arrivée des premiers bourgeons. Un coït interminable de connivence était ponctué de mes grognements virils et d’un cri strident et continu qui m’assurait du contentement majestueux de mon fourreau aux longs cheveux…

Le crissement des lames contre la pierre ponce me ramena dans la marmite où des guerriers nous avaient plongé mes compagnons d’infortune et moi.  Nous avions été capturés au cours d’un pique-nique crapuleux et seul Bosco avait pu s’échapper avec de grands coups d’épaules de taureau et un démarrage vers la forêt digne des plus grands milers. Je réfléchissais à quelques plans d’évasions même si les frôlements d’Orfée, en visite sur l’île ce jour-là, me troublaient. Sa présence me rassurait au fond de ce chaudron des délices de nous-mêmes et nous nous embrassâmes une dernière  fois de nos bouches goulues et assoiffées de liberté. Je lui fis un clin d’œil pour la réconforter car j’étais bien décidé à quitter le menu de ces guerriers cannibales imprévus dans mon agenda. Je frémissais au destin alimentaire de sa peau douce et rageais contre ce gâchis…

Ses mains habiles aiguisaient sans cesse mon envie de survivre et je lui savais grée de ce soutien moral et plus.  Un des cuisiniers nous recouvrit d’une couche supplémentaire de beurre salé des montagnes et je le pris en estime car dans le concert de nos destinées opposées mais complémentaires, de son onction suprême au milieu de ces légumes et compagnons, il avait compris le rouage essentiel de ma psychologie et ce qui mouvait mon horloge biologique de pirate. 

Le sentiment d’avoir bon goût…

(A Suivre…)

vendredi 18 novembre 2011

Le Secret de Rackham Le Rouge


Je suis bien calé dans ma cabine de Capitaine et je fais le point de mes voyages et aventures, relisant quelques pages et revivant quelques dames…Mon tricorne posé contre le poêle se réchauffe et se repose, il l’a bien mérité. Je suçote mon crayon et lève les yeux au plafond avant de revenir vers ma feuille, pour me nourrir de nouvelles histoires et de nouveaux personnages…

Je sens une transformation habituelle me prendre tout le corps et je me fais mon Cinéma, ressassant quelques films aux titres évocateurs. Mes amours me câlinent et je crois humer encore leurs parfums, émoustillé et amoureux… 

L’atmosphère est magique et tout mon corps se transmute pour retrouver l’extase de l’écriture, la dextérité de la main, l’inspiration des mots…

Je frétille et je sens mes oreilles pousser et ma queue fine balayer le vent de mouches imaginaires.

Je suis prêt à nouveau pour écrire, pour dessiner, pour raconter…


A tout bientôt…

Jack le Pirate

jeudi 10 novembre 2011

Une Bouteille à la Mer...- Par Solveig

 Bien cher Jack

 Une bouteille venue de l’eau m’annonce que, déjà, tu as deux cents ans. Voilà qui réjouirait les moins sages d’entre nous, de savoir qu’à si bel âge le tricorne et le sabre vont toujours de pair et de joie.
 Mon île lointaine suit toujours les rumeurs du monde, s’en effraie parfois. La solitude sied bien à mon caractère sombrement sauvage, moi qui ai su profiter des tumultes vivants, ceux qui balaient les carènes les plus apprêtées, les digues les plus hautes, les forts les plus épais.
Néanmoins, te souviens-tu des temps où, plus jeunes de quelques siècles, nous avons bivouaqué ensemble sur l’île du diable ?

Nul doute que les rochers ont gardé trace de nos histoires, celles que nous échangeâmes au coin d’un feu courtois, intense pourtant. C’est à cette occasion que tu m’appris quelques techniques efficaces pour parvenir en haut des mâts les plus hauts, sans déchoir jamais, plongeant sans hésiter dans les eaux claires de nos mers favorites. J’ai en mémoire la fameuse goélette qui osa mouiller non loin de moi, me permettant d’appliquer ton art, brassant les eaux salées de baisers sans fin, trempant les désert les plus secs d’une sève toujours plus fraîche, comme une orgie d’écume blanche incandescente.
 Bien sûr, aucun navire ne pouvait plus résister à mes assauts…C’est ainsi que je m’en lassais une nuit, me retirant comme une marée d’équinoxe, bien loin, découvrant le sable le plus blanc, le plus pur, si éblouissant qu’on ne peux plus approcher de ma peau sans se brûler les ailes.
Seule, la nuit polaire sait calmer mes ardeurs, l’aurore boréale éclipsant sans peine la lumière solaire qui me rend aveugle à toute raison.

J’ai disparu, décidant de laisser les hommes à leurs ébats, étant tellement déçue par eux, pauvres mortels.
Tu restes l’amiral des mers que je préfère, capable de serrer au près sans perdre de vue la côte, ton cap.
Je te souhaite de vivre les mille prochaines années satisfait des rencontres qui te nourrissent, homme de bel appétit.
 Ne m’en veux pas de ne pas dévoiler ma position, je souhaite encore garder le silence quelques temps, mais accepte ce présent, l’ami qui manquait à ton vaisseau pilote, ce perroquet splendide auquel j’ai appris quelques jolis mots de tes favoris. Il a le don de reconnaître la femme qui ment de celle qui est sincère, crois-moi cela peut t’être utile, à notre époque il devient difficile de démêler la vraie de la fausse.
Il s’appelle Miquel Angelo, oui, c’est son plumage baroque excessif qui m’a inspiré ce nom.
Si tu l’appelles Mickey, je le saurais, et je ne te le pardonnerai pas.
 Bien à toi mon ami,
Solveig qui t’embrasse comme tu sais que je sais le faire.


 La Canicule a retenu longtemps entre des rochers cette bouteille de Solveig, libérée par les premiers frimas de l'Automne...Je vous la livre aujourd'hui, intacte. Grand merci à la moussaillonne...J.R.

lundi 31 octobre 2011

Un Conte d’Halloween

Un sourire de circonstance zébrant ma barbe de Capitaine, je toisais les 40 moutards que m’avait laissés Tim. Dispersés en cercle dans ma cabine, ils étaient le fruit d’une absence subite d’une enseignante de ses amies, même si mon expérience m’avait appris que la vérité pouvait s’appeler gueule de bois ou escapade amoureuse plutôt que mal de dents ou sinusite.

Fouillant au fin fond de mon imaginaire, je poussais un grand soupir pour que s’opère dans mon cerveau comme par magie et comme d’habitude, l’improvisation d’une histoire. Et comme à chaque fois, le miracle s’accomplit.

« Il était une fois… » Commençais-je, sous une ovation de « Haaa » ou de « Hooo ». C’était gagné…

« …une vieille sorcière nommée Oween. Ce n’était pas une gentille sorcière rigolote et tout comme Maia-Luna, non, mais elle avait une solide plantation de potirons sur les hauteurs de Cancun. Les Caraïbes n’étaient pas encore un des centres de circuits maritimes du monde et les sorcières devaient faire preuve d’imagination pour survivre. Celle-ci avait eu un coup de cœur pour la soupe au potiron et elle en planta des hectares tout autour de sa demeure, perchée sur  les hauteurs de la ville. Pourtant et malgré un prix tout à fait abordable, elle se retrouva avec des tonnes de ces citrouilles oranges sur les bras. Novembre arrivait à grand pas et quelques garnements lui donnèrent une idée, même sans le vouloir… »

« Et c’était quoi ? » lança un des minots, la mèche hirsute et déjà au bord des larmes.

« Voulant se moquer de cette sorcière patibulaire, ils avaient pris un des potirons oubliés sur sa véranda et creusèrent l’intérieur pour ensuite lui faire des yeux et une bouche horribles, y mettant une bougie pour donner une impression d’esprit maléfique et faire peur aux passants. Mais leur tour n’eut pas l’effet repoussant qu’ils escomptaient. Un riche américain d’origine irlandaise vit cette tête illuminée et s’arrêta pour acheter les droits et tout son stock de citrouilles à la sorcière ravie. Il ramena par navires en Irlande ce qui devint une tradition au moment de la Toussaint dans toutes les îles Britanniques. Ainsi est l’origine de ce 31 octobre et tous ces déguisements et farces…

Quelques rires fusèrent dans la cabine et j’étais content de mon petit effet. Pourtant un des gamins les plus éveillés prit la parole en levant le doigt et fit mine de prolonger mon histoire.

« Moi j’ai un oncle fleuriste qui a un stock de chrysanthèmes et j’ai bien peur qu’il lui reste sur les bras. Z’avez pas une petite idée pour lui mon Capitaine ? » 


Les histoires se mélangent au fil du temps et quelques fois, on a du mal à s’y retrouver. Pourtant, le cœur d’un Capitaine suffit parfois à retrouver le souffle des légendes et à le transmettre à tous les enfants, petits et grands…

Besos
Jack Rackham.

jeudi 27 octobre 2011

Un Amour Eternel

Ils sont l’un contre l’autre.

Leurs bouchent s’effleurent à peine mais se goûtent, se délectant.

Leurs corps se connaissent tant mais ils ne préfèrent que l’autre…

Le jasmin enrobe leurs pigments, l’air marin masque leurs souffles et l’été magnifie leur étreinte d’instants de velours suaves. Leurs sueurs coulent en torrents miniatures de fièvres orientales et leurs orgasmes se muent en pétales de roses qui écrivent leurs noms…

Ils se souviennent de leur amour premier, de leurs émois primaux, et mesurent le chemin jusqu’à cette île blanche qui cercla leur destin. Leurs mains se croisent encore et leurs yeux gardent en eux encore les peaux douces quand ils sentent les rides enfantées par le temps.

« Je ne sais quel ce sortilège qui a arrêté ton temps quand le mien se disperse. J’ai beau passer pommade mais je sens mon teint qui se drape en linceul vers ma fin… »

« Tu es mon aimée et rien ne saura éteindre mon étreinte et mon sang. Je ne sais si ce magicien jadis n’a usé d’un charme pour me plaire. Je ne te connaissais point et je l’ai oublié pour succomber au tien. Le temps est passé si vite, le bonheur fut si grand que j’aperçois ce malheur qui point… »


Brrr... Je me réveille dans mon hamac et essaye d’oublier ce mauvais rêve. La goélette a du passer une tempête ou une barrière de corail et j’ai tout mélangé, après cette soirée arrosée de rhum blanc et de discussions sur l’amour éternel. J’t’en foutrais moi ! Je remets mon tricorne et grimpe sur la passerelle jusqu’au pont de commandement. Je vois Tim qui s’avance, mais…

« Qu’est-ce que tu as, Tim ? Tu as l’air d’une enfant… »

« J’ai bien vu ton regard posé hier sur cette midinette adolescente qui servait les repas, Jack. J’ai pris les devants et un sorcier de mes connaissances m’a concocté un filtre de rajeunissement afin d’éviter les mauvaises surprises dues à l’âge, comme les dénigrements ou répudiations de tous genres. J’ai maintenant quinze ans partout  et suis prête à affronter les tourments de la vie de couple, en y mettant quelques atouts de mon côté. 

Alors, qu’est-ce que tu en dis…Papa ?



Photo de Catherine Ashmore : "Phèdre" de Ted Hugues, avec Helen Mirren et Dominic Cooper.