vendredi 26 juin 2009

Lady Ania Chester


Il fait bon en ces jours d’été, trop bon. J’ai quitté mes cordes pour le hamac, et je vogue vers mon imaginaire de pirate, oubliant que son balancement régulier va me projeter dans le temps, un temps pas si lointain mais différent de mon quotidien habituel…

Je suis content, les affaires marchent bien, le pillage des voiliers marchands bat son train et j’ai décidé de m’agrandir. Je me suis adjoint une personne dont j’avais besoin au plus haut point pour développer RACKHAM Red’s Company : Une attachée de Presse !

Elle arrive à 7 heures tapantes sur le ponton devant le bateau. Elle dit bonjour au personnel de chargement ou déchargement et va porter à Tim les coupures de presse recueillies au Magasin Général de Cancun. Quatre à quatre, elle grimpe jusqu’à mon bureau : LADY ANIA CHESTER.

Lady Ania s’occupe de tout, des contrats maritimes des nouveaux clients à la promotion des ventes, se chargeant même des receleurs et autres revendeurs pour écouler rapidement les cargaisons volées. Ses journées n’ont pas de fin et elle trouve même le moyen de faire quelques pas de danse à la sortie de quart des marins. Tout le monde adore Ania, et même moi…

C’est une fille brune de grande taille et ses jambes n’ont pas de fin. Elle est fine et élancée, et sa silhouette n’ajoute qu’à sa démarche féline et discrète. Ses mèches de cheveux longs accentuent son air souriant et détendu et sa voix suave et grave prête à l’écoute et donne de l’intelligence à ses propos toujours pertinents. Un humour bien senti vient couronner la sympathie qu’elle dégage, mais Lady Ania Chester, c’est encore plus que ça…

Ses yeux en amande cernés de noirs semblent venus d’une autre planète et vous regardent si bien qu’on diraient deux pinceaux qui vous repeignent le cœur. Et sa peau métisse d’une couleur indéfinie vous éclaire tant son grain est beau et fin. L’ensemble est sorti comme d’une porte de l’univers et même quand elle trébuche de ses hauts talons, elle dégage tant de grâce que personne ne songe à se moquer d’elle mais tombe aussitôt sous le charme…

Sa gentillesse n’est pas que légendaire et souvent elle se baisse pour ne pas dépasser d’une tête ses interlocuteurs. Sa modestie, sa culture, son courage et ses prises de positions en font d’elles, une personne hors du commun. Je crois bien que je suis amoureux d’elle...même si je me dis qu'elle est trop belle pour moi.

Tim d’ailleurs me fait la tête à son sujet. J’ai organisé ce soir une fête en son honneur…Tout le monde était là, ses amis, sa famille, et tout le personnel du Poséïdon. Elle était vraiment contente, j’ai même cru qu’elle a pleuré. Il y avait un gros gâteau et des bougies, des cadeaux, qu’elle a tous ouverts un à un, pour que chacun soit honoré de son attention…


Pour se venger, Tim a fait du gringue au jeune Davis et lui a même proposé de passer la nuit avec nous. Ah, on est fins là, tous les trois sous les draps avec Tim au milieu qui tire la trogne. 
Les mains sur les draps, je regarde le plafond en souriant. 

Bon anniversaire, Lady Ania ! 

mardi 23 juin 2009

Au Museum d'histoire naturelle


Aussi vrai que je m’appelle Jack Rackham, ma vie n’est pas faite que d’abordages, de butins volés, de combats sanglants, de buveries, d’interminables parties de cartes ou de jambes en l’air. Non…

Quelquefois, je m’intéresse. Aux choses. 

Ce matin-là, je m’étais disputé avec Tim et avais décidé d’accoster à la Havane, pour me détendre. Hemingway, n’ayant pas encore écrit ses livres y était inconnu, mais laissait place libre pour s’intéresser à un Museum d’histoire naturelle tenu par Mademoiselle Bilouby. Je l’avais connue au cours d’un abordage, et ma foi, le souvenir de sa croupe m’avait donné envie de m’intéresser de plus près à sa carrière et son musée… 

J’aimais me balader dans les allées de vitrines garnies d’os et d’étiquettes écrites à la main, et quelquefois je m’arrêtais devant la reconstitution d’une scène préhistorique. Un petit panneau expliquait la vie de ces gens du Paléolithique...Je me demandais s’ils se disputaient de temps en temps, comme moi avec Tim, au sujet d’une coucherie ou d’une escapade.

Je regardais par terre la disposition des osselets retrouvés et le petit panneau « Mary » faisait peine tant la quantité d’os retrouvés était à peine suffisante pour donner goût à une soupe. De l’autre côté, plus imposant, les gros os de « John » lui conférait plus d’importance, même si une brisure de tibia indiquait que la belle s’était défendue…

C’était le cas aussi de Mademoiselle Bilouby jadis. Ses qualités purement féminines lui avaient sauvé la vie ainsi que celles de tout l’équipage du TORNADO, et elle mettait un point d’honneur à me donner les intérêts à chaque visite dans son bureau. Je crois néanmoins qu’elle aimait ça, et son appétit m’invitait à la contenter très longuement... Puis cette petite femme aux lunettes rondes, m’accompagnait à la porte pour un au-revoir poli et souvent j’apercevais un clin d’œil envers le gardien, imaginant leurs ébats entre les os de John et de Mary…

Revenant vers le bateau, je pensais à Tim et nos os retrouvés bien des années plus tard…
Le « Tu es un bon à rien, Jack ! » de ce matin résonnait encore à mes oreilles et je me représentais quelques archélogues retrouvant mes os et les honorant dans un musée pour exemple unique de cette époque, pour le plus grand bien de l’humanité…

samedi 20 juin 2009

Madeleine


Je n’étais pas encore Jack Rackham et je rentrais à peine à l’école maritime du Capitaine Longfellows. Je venais de lier connaissance avec un autre élève, un certain Mildred et quelquefois nous prenions du temps devant quelques brasseries à regarder passer les filles.

C’est ainsi que je connus Madeleine, une jeune étudiante en couture et broderie, qui aimait passer devant les vitrines du Bourg de Cancun. Son amie Jeanne, moins timide, avait accosté mon camarade rouquin et c’est ainsi que nous nous retrouvions régulièrement tous les quatre devant un café, une bière ou un fou rire.

Pas d’idylle ou d’amourette entre nous pourtant, attendant un vent propice ou une occasion. Justement, elle se présenta sous la forme d’un spectacle de chant, organisé au Café-concert du Palace Cancun, nouvel endroit en vogue de la région. Un chanteur s’y représentait, Francisco Landa, et nous avions convenu de nous retrouver là-bas.

La salle était immense et ce fut un hasard de tomber sur nos deux cavalières. Le dit-Francisco avait plutôt écorché mes oreilles jusque là et quelques flambeaux mal accrochés avaient failli nous éborgner sous les vibrations dues à ses cordes vocales. Jusqu’au moment où…

La dernière chanson de la soirée recueillait un certain succès et quelques mouvements de foule annonçait la fin prochaine du spectacle. Comme dans un océan de personnes, une houle humaine commença à entraîner Madeleine. Le courant l’emmenait vers le centre du dôme et je réalisais le danger qu'elle courait. Elle criait « John ! »…c’était moi !

Mon sang ne fit qu’un tour : Je bousculais un garde à l’entrée, et lui prenait son fouet. Je grimpais d’un bond sur les épaules de Mildred, tremblant, et j’accrochais la lanière du cuir d’un coup claquant, à une poutrelle centrale. Je m’élançais et me balançais pour m’y retrouver à cheval. Madeleine hurlait, presque écrasée et me regardait les yeux exorbités…Aucun son ne sortait de sa bouche mais je l’entendais crier « John ! ».

Je tendis ma main vers elle , m’accrochant au fouet et à la poutrelle. Nos doigts se frôlèrent, puis je lui pris la paume en entier, ses yeux semblaient rentrer dans les miens, je tirais et la ramenais vers moi…Madeleine !

Tout le monde était sorti. Nous étions là, parmi les autres, mais ne voyant que nous. Ma main tenait toujours la sienne, et j’eus l’impression que jamais nous ne nous lâcherions…Comme si c’était pour toujours.

Un peu plus tard, nus dans la chambre de son appartement, elle me dit un « Je t’aime » tout bas dans le creux de l’oreille, puis me prenant dans sa bouche, je lui donnais mes preuves d’amour qu’elle avalait goulûment…

Madeleine, ma première histoire d’amour.

jeudi 18 juin 2009

8 Voeux


Je n'avais pas vu le coup venir. Au début, je pensais simplement à du guano d'un vol de mouette perdue au dessus de mon bateau, et puis non. Karine m'avait taggué...La marque rouge était nette et annonçait nettement : 8 voeux...
1 Que j'arrive un jour à croiser le chemin des femmes que je n'ai pas eu, au long de mes croisières ou mes périples terrestres. Que viennent à moi un jour : Lola, Sandra, Emmanuelle, Dolorès, Aziza, Nina, Hortense, Isabelle, Fanny, Elizabeth, Béatrice, Fiona, Ursula et tant d'autres...
2 Que j'arrive un jour à voler, telle une mouette entre les mats de mon navire, ou un aigle transperçant le ciel, planant vers de nouvelles aventures !
3 Que l'Olympique de Marcel devienne Champion de Navarre et batte le Bayern de Monique en finale de la ligue des champions !
4 Qu'on invente l'arbre à pains afin que nul ne meurt plus de faim...
5 Que plus jamais on ne déclare guerre par les mers et les monts, que le bonheur se répande à jamais sur la Terre et les mers ! Et ce même si je suis au chomage...
6 Qu'on baisse le prix des places du Cinématographe afin que pleines soient les salles et nos yeux !
7 Qu'Internet ne soit pas bridé pour télécharger nos mélodies et rengaines, que Carla, Zazie et  Mylène se trouvent d'autres moyens de régenter leurs écoutes !
8 Que Roberta n'arrive pas me retrouver...Je l'ai un jour laissée à mes matelots la nuit de nos Noces pour m'enfuir. Elle me cherche inlassablement, son courroux est immense sa vengeance sera terrible  !
Voilà les 8 voeux que je ferais pour changer quelque chose ci-bas. Je devais aussi donner 8 définitions de mots donnés, mais ça me barbe et préfère donner citations de 8 de mes bloggeurs favoris, que je consulte ô combien entre mes voiles :
CHARLEMAGNE, dont j'adore les histoires érotico-policières et sa candeur d'amant déchu, MES MOTS RANDOM et ses poèmes doux-amers aux rimes immuables, MODELE et son assistante sociale à l'écriture de prix goncourt, FLEUR DE CACTUS et ses piquants cancanniers mondains à l'oeil photographique, ANTHROPOPHAGE au corpus endiablé et aux tournures littéraires "Picassiennes", ICONOGRAPHIQUE aux tourments magnifiques et aux rébus elliptyques, la CARPE de l'émotion esthétique littéraire et picturale, les CHUCHOTEMENTS de l'écrivain cinéaste qui raconte d'autres vies...
J'embrasse Eloïse, Colombine, Maïa Luna, Marie, Isabelle et tous les autres, et ne taggue personne en particulier, laissant libre-cours à vos volontés...Merci Karine et bon déménagement ! Jack, de mon bateau...

lundi 15 juin 2009

L'Ange noir


Elle avait accosté son radeau contre mon bateau. Je n’avais même pas entendu le frottis de ses troncs contre la goélette. Il faisait nuit et nous chargions à la lampe quelques cargaisons de rhum à destination de Rangoon…

Je me plongeais ensuite sur mon amas de cordes favori, à la poursuite d’un texte qui jamais ne vint et je me levais un instant pour me dégourdir, quand j’aperçus cette embarcation contre le navire. Une lueur semblait venir d’une chambre de toile en son centre, et j’entendis une voix grave appeler, je ne sus jamais si ce fut mon nom…

Je sautais sur radeau d’un bond et m’approcha de la pièce. Je soulevais le drap de toile…elle était là. Je ne vis ni ses yeux, ni son corps mais je sentis sa présence et moi-même je crus perdre la vue momentanément. Je me laissais guider par cette voix rauque, chaude et profonde…Je m’assis à côté d’elle et nous bavardâmes. Longtemps…

Une Lune voilée couvrait nos propos comme de la pudeur, et chaque fois que nous bougions, nous sentions nos cheveux se frôler comme des paumes de mains sur nos peaux. Nous griffonnions aussi nos desseins et tracions des plans sur nos planètes. Nous mélangions ce que nous croyions être nos yeux et nos sourires répondaient comme des acquiescements évidents de nos savoirs…

Mais les ténèbres de la nuit firent pâlir nos lumières et elle eut peur. Je me levais et tournais sur moi-même pour mieux cerner ces ombres. Je sortais mon sabre et faisais mine de les combattre, ne sachant pas vraiment où elles étaient…Peu à peu je recouvrais la vue et m’éloignais d’elle, hurlante et tremblante. Elle paraissait ailleurs et semblait voir un autre monde que le mien. D’un coup…

…Elle parut grandir et mesurer plusieurs mètres de haut. Les ailes que je lui vis dans le dos semblaient comme dessinées par les plus grands artistes et lui conféraient une grâce jamais vue. Elle devait être appelée par un autre monde, préparant un envol ultime. Avait-elle vraiment envie de partir vers cet inconnu, ce monde d’ombres ? Les larmes que je remarquais sur son visage au moment où des bras sortaient de nuages noirs pour mieux la prendre…

Je lançais mon tricorne dans les airs et montais d’un bond sur la rambarde du bateau. Quelques coups de sabre me dégagèrent et je tendis ma main au moment où je la vis monter vers le ciel. La Lune se découvrit de ses nuages opaques et nous éclaira…

Elle prit ma main, et se posa doucement sur le pont près de moi. Nos regards se croisèrent pour la première fois et je vis dans ses yeux le chemin de son cœur…

C’était un ange.

samedi 13 juin 2009

Jack L'éclair


Il y a bien des pirates dans la Mer des Caraïbes et Jack Sparrow en est le plus célèbre...

La courtoisie fait quelquefois que nous nous réunissons pour partager un café, voire même un abordage.  Ce jour-là, j'avais convié Sparrow pour le thé...Une partie de Poker agrémenterait l'après-midi et Tim avait même fait un gâteau. Les légendes ne rapportent des pirates que leurs combats en mer et leurs éxécutions, mais d'autres moments ont rempli leurs vies telle la rencontre qui eut lieu ce jour-là...

La partie de cartes battait son plein et Jack jetait un coup d'oeil de temps en temps vers Tim qui avait dégrafé de deux boutons son corsage. Elle était appuyé contre le buffet à nous regarder jouer, et le ressac du bateau donnait au mouvement de ses hanches des allures d'invitation à l'amour.

- Justement, coupa Jack Sparrow. Je ne vous ai jamais raconté le Don que Dieu m'a donné ? Hein ? Regardant Tim, qui n'en pouvait plus.

- Vous aussi, un Don ? M'exclamais-je.

- Je suis l'homme le plus rapide au monde à faire l'amour ! Lançant un clin d'oeil vers Tim.

- Vous voulez dire que vous ne gardez votre sang-froid longtemps, cher ami ? Coupais-je en ricanant.

- Non, je veux dire que de là où je suis, je peux par exemple faire l'amour à votre second et revenir sur ma chaise sans que vous ne me voyiez bouger. Ma rapidité est telle que nul ne peut me voir le faire.

Tim semblait imaginer la scène et son regard partait au loin, vivant le moment.

- Ah, bon ! C'est curieux comme Don. Mais allez-y, j'aimerais bien voir ça...

- Hum. Je recommence ?... Dit Jack Sparrow, toussant un peu et battant des cils.

Pendant que Tim souriait béatement...

jeudi 11 juin 2009

3 Petits Baumes au Coeur


Charl' m'avait taggué, et écrit : "Si Amélie Poulain aime briser la croûte d'une crème brûlée avec la pointe de la petite cuillère, faire des ricochets sur le canal Saint Martin et plonger la main dans un sac de grains, nous avons tous et toutes des petits plaisirs qui n'appartiennent qu'à nous et nous redonnent du baume au coeur.
Quels sont, comme Amélie, les trois petits plaisirs qui vous redonnent le baume au coeur?"
Je ne connais pas cette Amélie Poulain, pas de trace sur mon bateau, mais je peux vous confier ces trois petites choses qui me font quelque chose, qui sans être extra-ordinaires, me font frétiller le matin ou le soir...
Ici, on est hors-le-temps. Je tape sur mon portable ces quelques historiettes et pourtant je vis au rythme de ma goëlette, mouillant l'ancre et croisant le sabre...J'aime me plonger au temps du Cinématographe et découvrir un film, une histoire, des personnages. Ces vies non vécues me donnent de nouvelles peaux et je me glisse en elles comme un caméléon...Calé dans mon fauteuil, j'ai les sens en éveil, le coeur à l'écoute, les oreilles bercées de musique et de petits bruits de pas, de draps émiettés, de souffles courts et de mots glissés tout bas dans le creux de l'oreille. Ce ne sont pas Titanic, Autant en emporte le Vent, Gladiator ou le Seigneur des anneaux, mais ce sont de petits films qui racontent des histoires, tout simplement...
Elle ne se rend pas compte que je l'observe, que je l'épie...Je n'ai pas mis mon tricorne exprès, pour ne pas ombrer ma vison, son corsage. Elle parle sans arrêt, se touche les cheveux, se masse les épaules..Mon amie s'appelle Rita, Katia ou Patricia, et j'attends l'instant de ce petit bonheur où elle va le faire. Monter ses bras au ciel et me laisser voir ce dessert de tous les jours, cette intimité facile, sa pilosité et plis analogiques de son vagin, son dessous de bras...J'ai envie de la lécher, de renifler son odeur intime, mais ne le fais pas. Je savoure...
Comme tous les matins,les yeux encore collés, je frotte mon menton devant un café noir improvisé. Je regarde par le hublot, quelques mouettes rasantes de passage. J'attends Tim...Comme tous les matins, elle me rend visite pour mieux me faire plaisir. C'est une femme de goût, d'attention, de doigté...Elle rentre dans ma cabine, me sourit, mon coeur bat. Délicatement, elle le pose sur la table :  Le Magazine de la Pelote et des Courses, avec tous les résultats. Vraiment, elle me gâteTim...
Voilà, 3 petits plaisirs qui me mettent du baume au coeur. On me dit que je dois tagguer 5 personnes pour passer le relais. Je choisis Brigitte , Yaëlle, Quisas, Eloïse et Cactus. ( Bérénice et Karine sont déjà surbookées, d'autres absents ou occupés...) Merci Charl'...De mon bateau, Jack.

mardi 9 juin 2009

La Plume de Clochette



Tout est silence la nuit sur le bateau. A peine entend-on le grincement des coffres et des planchers que renvoie le bercement de la houle. Les eaux sont calmes et moi, Jack Rackham, les doigts de pieds en éventail surplombant le pied du lit, j’en profite pour plonger au pays imaginaire des fées et des pirates…

Seul un ronflement vient rompre le charme de mon arrivée, et je n’entends pas toquer sur mon front le martèlement d’un petit poing…
- Capitaine ! Hé ! Vous allez réveiller toute la chambrée ! Hé…Dit la petite fée Clochette, en tirant sur mes moustaches.
- Je n’ai pas fini ma nuit, moi. Laissez donc mes narines et mes boucles d’oreilles. Vocifères-je, en me retournant vers le coussin. Qui êtes-vous d’abord ?
- Je suis Fred, la petite rouquine du pays de Never. Je suis devenue Clochette au cours d’un tour de passe-passe…Je suis une fée à présent et possède tous les pouvoirs. Vous voulez voir ?

Crochet, un autre Capitaine, m’avait prévenu. Ces mondes imaginaires sont plein de personnages extravagants, surtout les petites libellules aux corps de femmes…Je regarde ma petite libellule, cette Clochette. Elle est plutôt rouquine, c’est vrai et elle est pourvue de milliers de petites tâches de rousseur. On dit que c’est le signe de toutes les envies amoureuses…Elle n’a pas beaucoup de vêtement sur elle et d’un œil malin, je remarque les petites pilosités rousses aux endroits stratégiques. Elle est pourvue d’ailes de libellules presque transparentes, diaphanes et tient devant elle une belle plume blanche et noire…

- C’est ma plume à chatouilles. Elle me sert aussi de baguette magique…

Et sur ce, la petite fée part à me chatouiller, des pieds à la tête…Et je me mets à rire, à rire, tellement fort que je fais des bonds dans le lit. Encore et encore…

Je suis enfoncé dans le coussin et je remarque que tout a changé, que tout est plus grand…

- Ben oui, Capitaine. Fallait pas rire des chatouilles ! Vous êtes à ma taille à présent, vous êtes à moi…Dit-elle en s’approchant.

C’est vrai ! J’ai rapetissé et je remarque que ma petite fée Clochette est une bien jolie femme, aux yeux en amande et aux seins potelés. Ses mèches rousses mettent en valeur son minois et son corps bien proportionné et sexy me fait déjà un effet fou…Elle doit aimer les poils de Capitaine et moi ceux des libellules, car nous nous dévorons littéralement. Nos langues et nos doigts furètent et titillent, nous avons faim l’un de l’autre, comme si nous marquions nos territoires…

Je vois sa tête rousse glisser sous mon ventre arrondi, et retrouver mon cher compagnon qui semble saluer mes couleurs ! Elle est gourmande, et joue avec sa langue...Sa gorge est profonde et j’ai l’impression qu’elle m’avale en serrant très fort mes sentinelles…sa langue n’en finit plus de passer et repasser…tout tourne…

« Capitaine ? » La voix de Mildred résonne encore dans ma tête. Bruits de draps. Miaulements. « Saleté de chat ! » J’ouvre les yeux , je vois Mildred qui tient le chat de Bosco par la queue et le balance au fond de la pièce. Je suis en nage…
- Dites-donc Capitaine…Ce sale chat était fourré dans votre lit. Vous n’avez rien ? Vous êtes tout drôle..
- Non, non, dis-je. Hagard. J’ai fait un mauvais rêve…
- Alors, ça va. Vous les connaissez ces chats rouquins, c’est des vicelards…

vendredi 5 juin 2009

Le Jour Où...


J’étais allongé sur le plancher de la cuisine, le nez entre les pages de ce fameux livre : 
Book of the Cook and Sorcellery. Sorcery était le véritable mot à utiliser, mais c’était écrit, c’était écrit…
Je me régalais des recettes telle la « Lampée de veau mode Trafalgar » ou « Lichette flambée de Tripoux caramel » et je tournais les pages avidement jusqu’au prochain guet-apens culinaire. Je me retrouvais propulsé des années en arrière par la force des choses, cette force s’appelant une virée en ville imprévue de Bosco, notre chef-cuistot. Nous avions bien sûr passé un « accord » et sa démarche déhanchée en descendant du bateau me disait que j’y étais allé un peu fort. Mais je me rappelais bien sa fougue pour un dessert aux fraises ou un gigot Marengo…

J’étais donc pour un jour cuistot du Poséidon et je me régalais déjà de ma cuistance. Quelque chose aurait du me mettre la puce à l’oreille, mais l’ambiance de la cuisine, la douceur des fourneaux avaient endormis mes signaux de détresse. Pourtant je crois au destin, à ces croisées de chemin, à ces jours marqués de craie blanche et je venais de franchir le seuil d’un de ceux-là…

« Croui croui ». Un drôle de bruit me vint aux oreilles pendant que j’épluchais les topinambours. Je levais la tête pour me faire une idée précise d’où venait ce bruit. « Croui croui ». Je prenais la coursive et montait les escaliers jusqu’au pont…

Ce que je vis me coupa le sang. Sara, ma belle sirène, Sara mon amour…faisant de la balançoire entre deux mats ! Le spectacle était ahurissant…Elle envoyait de toutes ses forces entre chaque aller et retour, et sa chevelure donnait le sillon de son envol circulaire. Ses dentelles au vent lui donnait un air angélique, contrasté légèrement par le spectacle de ses cuisses écartées qui laissaient transparaître la pilosité fournie de son sexe…

« Croui croui ».

Ce spectacle me rendait fou…Les cheveux de Sara étaient devenus roux depuis notre première rencontre. Le temps passé, les spasmes de sa vie, la jouissance…Elle me vit la voir et prit un nouvel élan encore plus fort, encore plus fou. Et entre deux balancements, nous échangions quelques mots :

- C’est vous Capitaine ?
- Oui, Sara…
- Ca faisait longtemps…
- Presque rien…
- J’ai pensé à vous…
- Moi aussi…

Nos regards traversaient les distances, sa balançoire semblait être arrêtée dans le temps, ses pieds pointant vers le ciel, nos désirs…

Soudain, un dernier élan prépara son saut et telle une féline vint atterrir en silence devant moi. Elle m’embrassa de sa langue et m’allongea en me guidant de sa main. Se retournant, elle s’assit sur mon visage et je goûtais ses lèvres chaudes et pulpeuses…Elle se pencha et me goûta aussi. Nos bouches burent et se rassasièrent de nous, jusqu’au fond…
D’un coup elle se leva et bondit sur la balançoire. De plusieurs coups de rein, elle prit son élan pour trouver de la vitesse. Elle me lança un dernier regard et me sourit. Je lui rendis son sourire et nous fûmes heureux.

Puis elle lança un dernier coup de balançoire et elle disparut dans le ciel…

Le ponton du bateau était toujours désert et je repris peu à peu mes esprits. Des hommes commencèrent à aller et venir, la vie à bord reprit et je descendis aux cuisines, hagard mais heureux.

Personne n’aurait pu m’enlever le petit sourire que j’avais à ce moment-là. Je savais que j’allais la revoir…

« Croui croui… »

mardi 2 juin 2009

Dialogue avec mon Psy


J’étais allongé sur le divan du carré des officiers, du moins tel qu’on l’appelait avant la mutinerie. Je fixais le tableau du Capitaine WILLOUBY, à qui il manquait un bras, un œil, et sans doute le pied marin car de mémoire, il ne savait pas nager.
J’attendais la première question du docteur SANTIAGO qui faisait office de psychologue.

Lilly était l’infirmière de bord du CARLITO. Nos bateaux avaient accosté à Cancun, bord à bord. Je remarquais son bustier flottant et elle avait vu mon tricorne. On se faisait des signes d’un pont à l’autre et on commença à s’envoyer des messages…

- On a commencé par échanger des politesses, vous savez, ces idioties qui ne veulent rien dire sauf pour les intéressés. C’était des signes que j’aurais reconnu entre mille…
- C’est à dire ?
- C’est à dire qu’on entamait des relations amoureuses…tout y est passé, les pigeons, les boomerangs, les bouteilles à la mer. Tout était bon pour s’envoyer des messages, des messages qui commençaient le matin par « Bonjour » et finissaient par « Je sais… »
- Vous saviez quoi ?
- Quand tout va bien dans les relations, on a envie de tout comprendre. Jamais on « ne sait pas ». On est dans l’empathie et le bonheur donne l’intelligence totale ! On savait…
- Quoi d’autre ?
- On s’envoyait des poèmes !
- Sûr ! Ca change des abordages et des coups de sabre à la cantonade, Capitaine Rackham !
- Je lui corrigeais ses fautes…
- Le professeur et son élève !
- J’illustrais même un de ces textes !
- Vous savez dessiner, Jack ?
- Vous savez, quand on croit qu’on sait, on sait…Ca lui plaisait en tous cas.
- Et vos messages, toujours aussi enflammés ?
- De plus en plus…Un jour, on fit même l’amour comme ça…Par message interposés…
- Vous n’avez pas pensé à vous voir, vous rencontrer sur le ponton ?
- On a joué le jeu…Ce n’est pas si simple. Je crois qu’elle ne voulait pas. Un secret…
- Etes-vous sûr que c’était elle de l’autre côté du bastingage ? Depuis Cyrano, on est plein de servantes qui écrivent pour leur maîtresse…
- Puis les relations se sont envenimées. Je devenais jaloux…
- Jaloux ? Mais de qui ?
- Elle envoyait des messages à un autre…Salaud !
- Comment le savez-vous ?
- J’avais intercepté une de ces bouteilles…
- Peut-être avait-elle fait exprès, pour voir…
- J’y ai pensé…mais trop tard. Je lui envoyais quelques missives bien senties. Trop…
- Cela mis de la distance entre vous…
- C’est ça, et en plus, son bateau partit pour l’île de Cozemal. C’est pas grand la Mer des Caraïbes mais bon…
- Les contacts furent coupés ? Continua le Doc.
- Pas vraiment, mais le cœur n’y était plus. D’autres histoires, d’autres messages perdus, d’autres colères…
- Décidément, Jack, vous perdez souvent votre sang-froid !
- Je décidais alors de couper les ponts,. Je n’avais plus la tête à la mer, à mon bateau, à Tim…Il fallait que je me reprenne, que je reprenne aussi mes esprits. Vous comprenez Docteur ?
- Je comprends que vous étiez devenu maboul…
- …Au point que je calculais un plan diabolique : La forcer, elle, à m’oublier et à me tourner le dos !
- Ah, je crois comprendre, je connais les femmes aussi Capitaine…
- Oui. Comme elle était orgueilleuse, elle avait tendance à faire le contraire de ce que je lui disais…Je la relançais donc à intervalle régulier, pour qu’elle ait le plaisir de me repousser, de ne plus répondre à mes messages, à mes fleurs…
- Fin stratège, commandant. Et ça a marché ?
- Oui. Les ponts sont rompus à présent, plus de messages, plus rien à l’horizon, Lilly c’est fini…
- Vous êtes libéré à présent, Jack !
- Ouiii…Fis-je en me relevant.

Je regardais une dernière fois le malheureux Willouby et je retournais vers mes cordes où m’attendait mon portable. Je savais quelle histoire j’allais y raconter…