samedi 19 mars 2016

La Beauté intérieure



Avoir trouvé ce nouveau port, cette nouvelle île, m’avait bouleversé. Des réminiscences me revenaient en bloc et tous les embruns de ma vie de marin semblaient embaumer mes narines, racontés dans mes premiers récits avec la fougue de ma jeunesse d’écrivain. Je frissonnais de toutes ces aventures vécues, des premières années d’école maritime jusqu’à l’île du Crâne et cette retraite dorée de Capitaine à quai.

L’école maritime du Capitaine Longfellows, ma belle Katia et la maison de la Veuve Sanders où j’avais connu mes premiers émois de jeune homme, étaient au panthéon de mes jeunes années, un âge d’or personnel incontournable comme l’invention du cinéma parlant ou du tabouret javanais, ce qui n’est pas peu dire.

La veuve Sanders. Je me souvenais d’elle, une grande dame à la forte poitrine, aux doubles mentons à répétition, aux cernes marquées comme des baldaquins, mais au cœur d’or et ayant été la première a me faire confiance en me donnant les clefs de sa maison, celle où j’avais croisé Katia et toutes ces filles superbes et travailleuses, dont je me souviendrais toute ma vie…

Un jour, elle m’avait trouvé un don et je devinais rapidement lequel, sous l’impulsion de ces charmantes donzelles, le lui prêtant même le temps d’un instant car elle le méritait bien. Je n’avais pas trop de préjugés sur ces histoires d’apparence, d’âge ou toutes sortes de codes moraux finalement basés sur l'aspect extérieur exclusivement.

A vrai dire, je n’avais pas moi-même un physique avantageux, malgré un tempérament joyeux et sûr de lui. Ayant du mal à séduire d’emblée comme les « beaux », je devais jouer sur mon bagout et mon charme volubile pour remporter la mise dans mes entreprises féminines, mais je gardais le cap malgré les déceptions. 

Souvenir de conversations au bout de la nuit  avec la petite Ingrid , acquiesçant à tous mes idéaux sur l’intelligence, la sincérité, la valeur personnelle et l’intégrité, ponctué d’une main sur épaule avec un regard de braise, et renvoyé aussitôt dans mes cordes par un : 

« Dis donc, t’as vu ta tronche ? »

Je gardais donc pour moi plus longtemps mon sabre de futur Capitaine, avant d’acquérir au fil du temps ma célèbre démarche chaloupée et mon aura brisant les cœurs et les tempêtes dans tous les ports…♥

Jack Rackham  

Photo : Lee Jeffries.

2 commentaires:

  1. Eh bien quoi ta tronche, qu'est ce qu'elle a ta tronche!Sourire charmeur, oeil perçant et la délicatesse d'honorer les vieilles dames, la grande classe!

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    1. Tu as les mots pour regonfler mes voiles, je t'adore!♥

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