Les mouettes tournent autour de sa coiffe attachée pour résister à tous les vents et son œil commence à scruter l’horizon, cherchant une vague qui flirterait avec une vigie oubliée.
Son manteau usé à a compté pour elle les jours de son départ, et ses cheveux filasse ne pensent plus à séduire que son miroir brisé posé sur la cheminée. Le printemps l’a sauvé de la froidure promise car elle n’a plus de bois. La Dame Willouby attend son mari pour couper ces prochains tronçons de chaleur, qu’il la serre dans ses bras. Elle a confiance, il reviendra…
C’était il y a presque longtemps, tant les jours s’égrènent et la narguent chaque matin. Elle coche sur un carnet son attente et les pages se tournent comme pour cacher le début de sa tourmente et de sa peur. La chasse à la baleine n’est pas si dangereuse mais elle a lu un livre où un capitaine périssait avec son navire pour défier une grande et blanche. Ici aux Caraïbes, elles sont petites et bleues et son Jimmy saurait bien convaincre son commandant de rebrousser chemin en cas de mauvais sort.
Les gens la saluent encore mais elle se cale contre une pile de bois se protégeant de la pitié et du désespoir. Le fil du temps lui a ôté l’appétit, la soif mais pas la patience. Tous les soirs elle rentre chez elle mais le matin se levant, elle est là qui revient l’attendre. Pour tenir compagnie aux vents et aux marées…
Des idées la traverse à présent, portant du noir, entourée de pleurs et de mains appuyées sur son dos. Madame Veuve Willouby...Brrr, elle n’y pense même pas…Elle avale sa salive et chaque jour se donne un jour de plus, prête à se donner une semaine, un mois, un trimestre de plus. Les mouettes ne la voient presque plus, une a faillé l’éborgner l’autre jour et un galant est venu lui proposer son aide et sa main…
Mais non, ça ne se passera pas comme ça ! Elle se fait violence pour tenir encore et encore et ne se résout à prendre le deuil, à baisser les bras, à ne plus l’attendre. Elle a presque oublié son odeur et son rire mais ses mains la caressent encore, et c’est bon. Elle tombe alors à genoux…
Un rayon de soleil traverse les nuages et vient frapper son front. Elle ôte son chapeau et plisse les yeux, croisant ses mains. Elle n’est jamais allée à l’église, ne croit même pas en dieu, mais elle croit en son Jimmy, il lui a promis…
Des hurlements horribles déchirent les cieux dont le bleu ne comprend pas ce tonnerre. On dirait une bête qui meurt, s’accrochant à ce cri pour rester encore en vie.
Les gens tournent la tête et regardent vers le ponton. La veuve est encore là.
Tiens, elle s’est relevée et s’approche de la plage.
Elle agite son bras, comme saluant l’horizon.
Ils baissent la tête et reprennent le cours de leurs vies.
Dame Willouby relève le menton et sourit. S’arrangeant les cheveux.
Jimmy est revenu…
Triste mais beau...j'ai une fois rêvé d'une situation presque similaire...j'avais du mal au réveil je dois avouer...
RépondreSupprimerLa Sultane.
Merci de la lecture, chère Sultane...
RépondreSupprimerOui, écrire c'est inventer ce genre de situation et voir comment réagissent les personnages. Alors en rêve...
Besos ♥
Ohhhh première lecture en tant que membre! c'est très beau , mais ça ma serré le coeur cette douleur décrite... très beau même si déchirant..
RépondreSupprimerbisous Pirate <3
Merci tite Luciole, tu éclaires mon blog !
RépondreSupprimerBienvenue nouveau membre ♥
Besos
Merci d' écrire pour les femmes qui sont toutes des " veuves de papier"....
RépondreSupprimerTôt ou tard ils s' en vont vers un horizon vierge,
En laissant drrière eux les aimées effarées,
Ce n' était qu' une escale, un fugitif arrêt,
Mais l' implacable mer trace un chemin de cierges.
Comme plante empotée on reste sur la berge,
Ne pouvant retenir l'envol silencieux,
Scrutant à s' aveugler la limite des cieux,
Espérant qu'à nouveau un soir l' esquif émerge.
Auront -ils le regret du coeur qu' on leur donna,
Qui laisse en sa poitrine sa blessure ouverte?
Savent-ils que nos mains vieillies de s'être offertes
Se sont tendues vers eux sans qu' on leur pardonnât?
Il faudra retourner parmi les rues désertes,
Seule à se lamenter sur cette triste perte...
Je l' ai écrit il y a longtemps, merci pour votre beau récit et son heureux dénouement.
Bonjour Jack comme il est bon de replonger dans les dédales des aventures de la vie avec toi...même le deuil je le sens salé au gout de la mer qui est comme la vie parfois une amie et bien des fois une pire ennemi...mais les mouettes reviennent toujours aussi fidèles qu'un soleil de printemps...ainsi la veuve serait un jour de nouveau heureuse...comme un espoir collé à l'horizon..Flora
RépondreSupprimer@ Orfeenix :
RépondreSupprimerEcrit il y a longtemps, ça fait donc longtemps que vous avez des mots et du talent !
Bien sûr un dénouement heureux, je raconte des histoires pour faire du bien aux coeurs même si je les malmène... :)
Besos Isabelle ♥
@ Flora :
RépondreSupprimerJe t'ai guettée longtemps sur mon ponton des soupirs, et te voilà ! Oui, c'est un texte sur l'amour et l'espoir, sur le regard des autres aussi...Te voilà de retour ! Besos Flora ♥
Lorsque sur le port de Saint-Jean de Luz, nous attendions le retour du cousin Pierre, c'était pour moi la certitude d'entendre de belles histoires, et je ne comprenais pas pourquoi, les femmes regardaient avec angoisse l'horizon, elles qui devaient être heureuses de revoir leur homme. J'ignorais les dangers que pouvaient rencontrer ces pêcheurs embarqués sur les thoniers.
RépondreSupprimerOui, c'est ça Rosée...Heureusement, l'enfance protège de ces soucis et ce doit être l'inquiétude qui fait vieillir et donne les cheveux blancs !
RépondreSupprimerMuxus ♥
votre texte m a fait revé... <3 merci gwendoline
RépondreSupprimerMerci à vous Gwendoline, je suis flatté...
RépondreSupprimerBesos de Capitaine ♥
Un très joli texte sur lequel plane l'ombre de la Maîtresse du Lieutenant français !
RépondreSupprimerAh c'est vrai, Gicerilla. Ce film peut s'approcher...
RépondreSupprimerMerci du passage et du très joli ^^
Besos ♥