L’homme prit
place derrière la file de personnes qui attendaient leur tour et marqua son
arrivée d’un raclement de gorge, net et court. Il n’était ni grand ni beau mais
planté sur ses jambes, sûr de lui et regardait vers la pharmacienne d ‘un œil
franc et direct. Rien ne les reliait particulièrement, sinon la proximité de
l’établissement de la maison familiale.
Elle se
tourna et leva discrètement le nez, mâchonnant un bonjour inaudible. Beaucoup
de gens entraient et sortaient de l’endroit et machinalement, elle enregistra
sa présence telle une physionomiste professionnelle. Son eau de toilette lui
plaisait bien, chose inhabituelle chez la clientèle plutôt habituée à utiliser
de l’eau de Cologne basique, virant dès les premières chaleurs de la matinée et
obligeant le personnel à une omerta nasale automatique.
Sa chevelure
brune et son port de tête fit qu’il la trouva différente. Les autres employées
allant et venant n’ayant aucun attrait à ses yeux. Son tour approchait et il
pria d’être servi par cette femme dont il essayait de deviner le prénom. Un jeu
de regards imperceptible avec une collègue et miracle de la loterie des files
d’attentes, il la trouva devant lui, charmante et digne, telle la vraie
patronne du magasin et attendant sa demande.
Elle alla
chercher les médicaments commandés selon les prescriptions du médecin, et le
papier froissé dans la main, elle allait telle une aventurière à l’intérieur du
dédale d’étagères et boîtes en tous genres qui constituaient un vrai labyrinthe.
Se regardant alors par-dessus un tiroir
ouvert, leurs yeux se croisèrent et ils furent troublés comme si un secret
commun venait de les lier.
L’œil clair
et franc, elle s’avança vers le comptoir et ils échangèrent quelques politesses
qui furent noyés dans un brouillard nappé de confusions et de bredouillements
mutuels.
Au moment de
partir, il la sentit regardant ses talons et il tenta une œillade
perpendiculaire au sortir du magasin, comme image volée pour l’album virtuel de
ses pensées. Bien rangée pour mieux en profiter seul, telle une
gourmandise secrète.
Puis il
revint un peu plus tard, et la retrouva intacte comme si les jours s’étaient
arrêtés de passer. La magie opérait toujours mais ils ne s’étonnaient de rien,
ne se demandant même s’ils pouvaient partager simultanément cette impression.
La pharmacie
devint comme un lieu de mystère hors du temps et au fil des ordonnances, ils
répétèrent le bal de leurs espérances, se demandant jusqu’à quand cela
continuerait.
Une fois
pourtant, il comprit un jeu de rires entre les employées, comme si la belle
avait parlé de quelque chose qui était trop lourd à garder sur son cœur. Son regard
noir d’un courroux sans pitié fut tel que le ciel s’assombrit et fit taire aussitôt
toutes les pipelettes à quolibets.
Un soir s’approchant
de la fermeture, il passa juste pour la voir. Ils étaient seuls pour la
première fois et c’est machinalement qu’elle actionna le rideau de fer. Il la
prit dans ses bras et l’embrassa, comme jamais il ne l’avait rêvé. Elle le
regardait droit dans les yeux et dégagea le plateau d’un comptoir comme pour mieux
l’inviter.
Sa peau
était douce et le corps de l’homme se fit pressant. Elle caressait sa barbe et
il remonta sur lui les jambes de Virginie, comme pour mieux la connaitre.
Doucement,
il rentrait dans sa vie…
Photo du bas : Linda Fiorentino.
Quelle jolie histoire, elle a le parfum des films des années 50, par contre ne te rends pas malade exprès,ils vendent aussi du dentifrice, du savon....
RépondreSupprimerC'est vrai que c'est un truc à être accroc aux ordonnances...Ah, le romantisme dans les rencontres, c'est pour ça qu'on vit ! Besos ma belle ♥
SupprimerDoucement il rentrait dans sa vie... jolie façon d'exprimer les choses, captain!
RépondreSupprimerEt puis une belle pharmacienne, n'est-ce pas le rêve de tout homme ? Nue sous sa blouse, toujours parfumée, présos à volonté et jamais la migraine...
-Rhhôhô ! mademoiselle Célestine !
-Oui je sais, je suis d'un romantisme exacerbé ce matin...Pas taper, pas taper ! ^^
Je te taquine, mais j'ai beaucoup aimé ton histoire.
¸¸.•*¨*• ☆
Tu fais plutôt le tableau des infirmières là, mais je connais bien aussi ;)
SupprimerUn peu de romantisme dans un monde de brutes, je suis sûr que tu apprécies, même si tu n'es pas pharmacienne...
Besos taquine Célestine ♥
Je n'aime que ça, en fait, le romantisme...
Supprimer^^
¸¸.•*¨*• ☆
Je le savais, c'est mon tricorne qui me la dit...^^
SupprimerTrop fort, ton tricorne ... ;-)
Supprimer¸¸.•*¨*• ☆
... et eurent beaucoup d'enfants. C'est ainsi que se terminaient les jolies histoires qu'on me lisait avant d'aller rejoindre le pays des rêves. Merci capitaine pour ce beau conte,que je viens de lire avant d'aller rejoindre Morphée
RépondreSupprimerPas de quoi, Rosée, f♥ais de beaux rêves ! Besos
SupprimerUne rencontre hors du temps et pourtant ...se rendre à la pharmacie réserve parfois de délicieuses surprises ...merci Rackham !
RépondreSupprimerDe rien Jerry, quelques souvenirs sublimés pour le bonheur de mes lecteurs... ;) ♥
SupprimerMoi je ne suis jamais nue sous ma blouse et je suis bien pharmacienne mais le soir à la fermeture...... pas sous le comptoir mais ??? Très joli romantisme ,bisous Rackham ,tu m'as manqué!
RépondreSupprimer`
Hmmm, les pharmaciennes ont néanmoins bien des mystères cachés sous leur blouse et le feu évidemment...J'adore aller à la pharmacie d'à-côté pour y chercher mes potions magiques, et observer aussi ce bal des pharmaciennes, aux regards attentifs et perçants qui remplacent bien d'autres paroles ;)
SupprimerMerci de ta visite Ava, tu m'as manqué aussi :)
Besos ♥