samedi 29 janvier 2011

La Bouteille a l'amer

Accoudé à la rambarde, je souris déjà d’un prochain soleil brûlant et j’ajuste mon tricorne comme pour le faire venir. Je plisse les yeux, souvenir d’une nuit de rêves appétissants et je tâte mon ventre d’un bacon et d’œufs qui vont bientôt remplir ma panse accueillante. Mes yeux saisissent quelque chose sur le bord de la plage, une pagaie, une branche, un je-ne-sais-quoi…

Mon acuité devine plus qu’elle ne voit et mes jambes déjà se mettent en route pour me rapprocher  de cet inconnu. Je balance comme un singe jusqu’à la plage, saluant d’un toussement le ponton. Plus j’approche et plus je cerne l’objet qui m’attend…

La mer bruisse de mille gouttes et je me baisse mollement, englué dans le sable mouillé qui semble aspirer mes sandales. Je flique-floque en revenant, tenant à la main mon trophée : Une bouteille à la mer !

Je la tourne et retourne, caressant son verre dépoli, pour savoir si elle cache un message, comme il est de coutume. Le bouchon est docile et  je tourne ma pogne doucement, libérant le goulot. Mon œil se glisse dans le verre protecteur et je vois du parchemin blanc m’inviter à le prendre. Mon doigt agile accroche le mystère et je sors le vélin.

Le vent fouette mon visage et filandre mes cheveux pendant que je lis mon message. Je dis bien mon message car il m’est adressé, en plein visage. Je connais cette écriture mais pas les mots qu’elle me conte. Je relis lentement et n’ose y  croire.

Des relents de souvenirs me remontent. Je ressens  ses cheveux, sa peau et son envie, comme une dernière fois. La marée de la vie a recouvert notre aventure de sable pour l’enfouir à jamais. Les mots sans équivoque durcissent mon cœur de pirate, qui repousse le chagrin et la peine d’un revers de manche.

Mais je sais bien que mon âme meurtrie va mettre du temps à déglutir oubli et palanquin de larmes. Je fais quelques pas de plus et je remonte la passerelle vers mon univers de Capitaine. Les hommes vont et viennent et ma gorge ne crie rien. Mon cou est pris comme dans de la glue pour invectiver mouettes et saligauds. Je prends un peu d’élan et je rejette la bouteille, à la mer. Très loin.

Je tiens le gouvernail et prends du vent comme pour me punir. Je sens ma gueule et mes sourcils qui froncent et je fais virevolter mon volant pour aller vers l’océan.

J’ai besoin de sentir des embruns d’aventure pour éviter de hurler jusqu’au Cap Horn.

Une simple bouteille m’a circoncit de ma jeunesse, coupant un lien et mon amour propre.

Une larme coule de ma joue rougie mais je serre les dents.

Je n’ai rien…

10 commentaires:

  1. oh oh ! des états d'âme ? Cap'tain ?
    Besos Pirate

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  2. Ah, même les mouettes se prennent un mat un jour et doivent reprendre leur souffle...^^
    Besos Nuax

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  3. quelques paroles me viennet à l'esprit...
    "Aux sombres héros de l'amer qui ont su traverser les océans du vide..."
    Une lame de fond qui bouleverse les sentiments, mer chagrine de remords et regrets. Vague à larmes le temps d'un grain.
    Muxus Pirate.

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  4. Jolies images poétiques, Maia !
    Mais pas de noir désir, que des couleurs qui refleurissent déjà sur mon pont des soupirs...^^
    Besos et merci de la visite, tite sorcière ♥

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  5. Il y aura toujours quelques choses qui nous fera repenser à des instants de notre vie passée: parfum, lettre, chanson, couleur....
    On est parfois heureux de replonger dans les souvenirs, d'autres non (pour ma part c'est le cas)
    Bon week-end Mon Capitaine

    ps: des oeufs et du bacon, tu sais que chez MD ils font des "eggs muffins" ( pain grillé oeuf bacon fromage)...UNE TUERIE

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  6. Tu vas rire : Je ne mange jamais d'oeufs au bacon, enfin le matin.
    Je réserve ça à mes aventures maritimes ici...^^

    Besos Victoria ♥

    ( Moi j'ai une mémoire d'éléphant mais pas par nostalgie, juste pour profiter encore des bonnes sensations...)

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  7. Cela me fait penser le jour où devant vider l'appartement de ma mère je suis tombée sur un paquet de lettres. Celles d'un de mes amours de jeunesse...elles étaient jolies et moi qui pendant des mois et des mois, les attendais. Pourquoi me les avoir cachées, je ne le saurai jamais, et lui ne sait pas que ces lettres vieilles de 25 ans, il n'y a que deux 2 ans que je les ai lu...Peut-être devrais-je lui dire ???

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  8. Comme quoi une chose en rappelle toujours une autre...
    Tes lettres me rappellent un film que j'ai vu récemment ( The Notebook/N'oublie jamais)...
    C'est une erreur en fait de priver un jeune de son courrier. Pour qu'il suive un autre chemin, plus raisonnable bien sûr ? Non, parce que des parents se trompent quelquefois et font de l'abus de pouvoir...

    Oui, tu devrais lui dire, il doit penser du mal de toi l'ancien jeune homme...^^
    Besos Rosée ♥

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  9. Tu n'as pas rien, puisque de l'amer est au moins né un talent. J'aime bien ce texte, le vocabulaire et les images qu'il fait naître.

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  10. J'apprends à écrire, peu à peu, en serrant les dents. c'est déjà ça...^^
    Merci Tifenn ♥

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