La nuit avait été rude...J'étais affalé dans les cordes, le soleil brillait haut et j'aperçevais Tim près du mât de misaine qui dirigeait la manoeuvre. Les hommes semblaient ensorcelés par ce second aux allures efféminées.Je portais mon attention à mon clavier, mon esprit s'embrumait, je tapais, n'ayant qu'à me souvenir et copier...
Ce dimanche-là, la Veuve Sanders m'avait consigné dans sa maison, m'allouant la fonction de gardien de la maisonnée, pendant qu'elle amenait tout le monde en bord de mer. Pour les faire profiter de l'air maritime, bénéfique pour leur santé, me dit-elle. J'aurais aimé les accompagner, bien sûr, mais je pensais que ce service m'amènerait un jour quelques privilèges...
Je m'étais installé dans le grand salon, m'étais servi sandwiches et jus de fruits, et feuilletais quelques livres interdits sur l'empire romain ou les nus artistiques, par exemple. Je manquais somnoler quand je fus dérangé par le chat.
Rosco était un chat pépère mais comme tous les chats, il fallait qu'il montre qu'il était là ! Je lui courais après dans toute la maison pour lui faire voir, quand je tombais sur une porte en vieux bois où était inscrit : KATIA. Je n'en revenais pas...
Je poussais doucement la porte et j'y rentrais comme dans la caverne d'Ali-Baba...
Le sourire aux lèvres, je contemplais chaque endroit, chaque mur orné de tentures, chaque bibelot posé et je m'asseyais au bord du lit. Il était confortable et j'imaginais bien des choses...Quand je remarquais une forme massive et sombre dépassant d'un renfoncement. Je la tirais au milieu de la pièce et découvrais une belle malle.
Je l'ouvrais facilement et éclairée par le jour du fenestron, j'y découvrais les trésors de ma belle amie : Foulards, chapeaux, bracelets et colliers, sous-vêtements, un modèle réduit de Goëlette, des vases, des robes blanches, quelques bourses de pièces d'argent, et quelques écrits...Je mettais de côté un paquet de lettres attachées, pendant que je feuilletais un cahier.
" Liste des Amants et comptes" en était le titre. J'avalais ma salive. Puis j'arrivais au détail que j'imaginais, en cherchant mon nom. C'était bien ça...16, 8, 14, , 12, 7, chacun était noté selon ses performances sans doute, et quelquefois, il y avait marqué un "Grosse" ou "vicieux". J'avais beau chercher, je ne me voyais point...Ce qui me brisait le coeur !
Le toussotement de Katia me fit sursauter, et elle me prit le livre des mains : "Dis mon gars, ne te gène pas. Pas beau de fouiller dans les affaires des autres !"
- Alors, tu es content ? Tu me connais mieux maintenant ! Tu sais, la vérité c'est pas le meilleur à savoir sur moi.
- Je n'y suis pas ! Je n'y suis pas dans ton cahier !
- Ben, c'est normal ! T'es pas un client ! Ha !Ha ! T'avais pris ça pour un carnet de notes ? Ce sont des pièces d'argent tout ça...12 = 12 pièces d'argent ! Dit-elle en rigolant avec ses dents blanches.
- Pardon...Dis-je en pleurnichant.
- Toi, t'es mon petit trésor ! Tu sais bien...
- Et ces lettres, là, qu'est-ce que c'est, Katia ? Dis-je, en montrant le paquet attaché.
- Ca ?...Dit-elle, en réfléchissant. Ce sont...des lettres d'amour, voilà.
- Et tu les as...ouvertes ?
- Quoi ? Les ouvrir ? Ca va pas, non ? Ca fait des soucis après...J'ai vu certains expéditeurs, ça m'suffit. Je rêve à ce qu'ils m'ont dit, j'imagine nos histoires, je suis heureuse comme ça moi...
- Peut-être qu'il y a des choses importantes dedans ?
- Ca non ! J'ai vu ça à la lumière, et pas de pièces en tous cas ! Ha ! Ha ! Bon allez, file ! Pas que ça à faire. Je suis revenu chercher une petite laine...Et tu m'as tout dérangé, je dois tout ranger maintenant...
Je détalais vite, car je savais que Katia avait le coup de pied facile. Je sortais dehors et revenais près de son fenestron. Elle était assise sur le lit et regardait son paquet de lettres sur les genoux. Elle en avait ouverte une et semblait heureuse, c'était vrai...
Moi aussi, j'étais heureux.
J'étais pas sûr à cent pour cent, mais je crois bien que je l'avais vue. Elle l'avait bien reçue, ma lettre d'amour...
je suis deja venue ce matin; j'y reviens...
RépondreSupprimerenvie de lire une lettre, de regarder l'horizon assise sur le pont :o)
C'est tres agreable a lire.
A bientot
Merci Karine...Ce sont vos commentaires qui me donnent la direction à suivre et me remercient.
RépondreSupprimerQui ne rêve jamais d'une belle lettre d'amour, ça fait partie des choses qui donnent envie de se lever le matin, en lire mais en écrire aussi...
Je me rends compte que ce texte est plutôt soft, pas fait exprès c'était mon sujet, mais tu vas voir le suivant, ouloulou !
Merci de la visite du pont,
A bientôt...
Jack.