Les hommes
pénétrèrent dans ma cabine à pas discrets, si l’on peut dire pour des pirates aguerris
aux abordages et défonçages en tous genres, et s’approchèrent du lit sous la
fenêtre qui était l’endroit le mieux éclairé de toute la pièce. Y posant doucement
la poupée, si délicatement en fait que je crus à un accident sur le pont dont
ils avaient transporté le corps de la victime, ils se mirent tous en rond
autour d’elle pendant que je sortais tranquillement de mon coin toilette, car à
l’époque les salles de bains n’existaient pas encore.
- Quoi ?
Qu’estchque vous… dis-je la bouche pleine d’un produit blanchâtre et mentholé
qui venait des Indes.
Restant
muets un long moment, les regards se renvoyaient les uns aux autres et je
commençais à soupçonner le début d’une mutinerie. J’avais déjà repéré le grand
sabre accroché au mur du fond et mentalement, je commençais un écrémage en règle de ma
belle compagnie matinale. Quand un raclement de gorge de Bosco suivi d’un
mouvement de menton m’incita à regarder de plus prés cette chose sur une lit.
- Une
poupée ? Dis-je. J’avais cru sur le moment à une fille et je m’avançais
pour mieux voir.
C’était si étonnant
de précision et de réalité que pendant un court instant, je crus bien à une nana.
Une de celles que j’avais bien connu dans tous les ports du monde et qui
moyennant quelques piécettes avaient embrouillé mes yeux et ébouriffé mon
tricorne. Mais non. J’effleurais son visage de mon pouce et je ressentis un
frisson comme à mes plus beaux jours de jeune homme.
- C’est
drôlement bien imité, dis-je, en comprenant d’un coup le pourquoi du comment.
- Joyeux
anniversaire, Captain ! Entonnèrent de concert les hommes, Mildred
arrivant avec un grand plateau d’argent et un gros gâteau à la crème couvert de
chantilly dessus.
Soufflant
sur les 5 bougies qui allaient avec, je jetais un œil à mon cadeau qui
ressemblait vraiment à un joli brin de fille. Fut-ce les bulles de champagne ou
l’émotion créée par cette surprise, je commençais à m’échauffer et
demandait un peu d’intimité à toute cette compagnie beuglante et ripaillante.
En quelques secondes, je fus seul avec ma nouvelle amie et décidais de tenter
une approche non équivoque sur mes intentions véritables. Frôlant de mes doigts
de velours sa toison brune dépassant du drap, elle ouvrit les yeux plus grands
encore et me regarda fixement mais avec douceur, clignotant des yeux comme un
jeune chiot. Ses cheveux longs et bruns couraient à côté d’elle sur le lit et je
la regardais longuement ayant toujours de drôles d’idées en tête.
Tout à coup,
elle posa sa main sur mon avant-bras et mes poils s’hérissèrent de mes orteils
jusqu’à la pointe de mon crâne. J’oubliais alors qu’elle était une poupée et je
me mis à la caresser aussi. L’effleurant à peine juste pour sentir sa féminité,
j’eus alors des visions étranges, des sortes de récits imaginaires arrivant dans
mes pensées déjà confuses mais qui les éclairaient d’une texture nouvelle. J’étais déjà un drôle
de capitaine avec des habitudes littéraires et créatives qui sortaient de l’ordinaire,
mais je sentais là l’expression d’un souffle nouveau, d’une nouvelle
inspiration qui me séduisait, captivant mon intérêt et aiguisant mon
imagination.
J’essayais
de m’approcher un peu plus mais d’un signe de la main, elle me signifia la fin
des opérations. J’étais éconduit dans ma propre cabine, le jour même de mon
anniversaire, mais je souriais de l’aventure. Elle disparut juste après, comme
par enchantement mais je savais que ce bateau recélait bien mystères qu’il
pourrait me la rendre un jour.
Je fermais
les yeux.
Je posai
mon rasoir sur le rebord de la cuvette quand on tapa à la porte. Bosco était
là, et quelques hommes derrière lui portant une grosse tarte aux fraises
surmontée de chantilly et de quelques bougies. Il s’avança en bafouillant, il
tenait quelques choses dans sa main.
« Un plumier et quelques livres de Jules
Verne, ce n’est pas grand-chose mais on a pensé que ce la vous serait utile,
mon Capitaine…. »
Jack Rackham
PS :
Pour info, mon anniversaire est le 27 juin !
Photo : Claudia Koll
C'est vrai qu'ils font de ces matières plastiques super bien imitée, de nos jours...C'est bluffant !
RépondreSupprimerElle n'a pas fermé les yeux quand tu l'as couchée. Elle n'a pas fait "maman!" quand tu l'as touchée. Tu ne t'ai pas fait tout petit. Je dois me tromper d'histoire...Mais celle-ci est jolie aussi !
Enfin, comme dit le proverbe, souvent poupée varie...Peut être qu'un jour elle dira oui ?
Bises ô capitaine
¸¸.•*¨*• ☆
Oui Célestine, on va revoir ce personnage sur ma goélette
Supprimermais chuuut, ça c'est une autre histoire ;)
Besos ô Galinette ♥
J'ai une très grande confiance en mon Rackam capable en vrai Pygmalion de donner vie et vigueur aux poupées les plus rétives! Et comme je m'y connais en poupées à pirates je vais lui donner un conseil: ne jamais se laver les dents!Un pirate sent le rhum et la pipe...
RépondreSupprimerMerci de ta confiance et tes conseils Orfeenix, je vais laisser tomber pour le dentifrice et donner un vrai baiser de Capitaine qui lui rappellera les goûts multiples de l'amour...^^
SupprimerUne poupée bien vivante qui donne des frissons au capitaine et aussi à ses fidèles matelots . Merci pour ce cadeau Rackham le Rouge !
RépondreSupprimerLe plaisir était pour moi ;)
RépondreSupprimerEh ! ben si elle dit non, c’est qu’elle se dégonfle déjà !!! Besos
RépondreSupprimerUne femme, même en poupée, reste une femme ^^
SupprimerBesos !! ♥