La feuille
blanche est là qui me nargue comme une effrontée et je rentre la tête dans les
épaules, froissant l’arrière de mon tricorne et ma vanité. Les idées sont
notées, le chemin de fer siffle à mes oreilles comme une bouilloire vivante, je
tiens le corps du récit comme une sacripande et je fais glisser mes doigts
cornus plein de chatouilles maladroites pour faire frétiller la sirène de mes
mots coincés quelque part entre les méandres de ma trouille inavouée.
Soudain, je
sens un souffle ami sur ma joue hirsute, grelotant de l’insolitude agréée et je
romps aussitôt ce vœu de silence inconscient lâchant les flots d’inspiration contenue
tel un réservoir renversé à grands flots dans un jardin de bonne terre…
Elle m’a
apaisé et je la regarde par-dessus mon épaule, esquissant quelques traits d’abord,
la prenant pour modèle telle une muse de mon talent enfui puis retrouvé. Ma
main glisse sur les contours de sa forme, intelligente et belle comme une œuvre
complète, originale et hors du commun.
Le dessin
est à sa gloire, je la regarde encore un peu, pour m’en régaler sans la
consommer ou la déranger. L’instant d’un clignement d’yeux pour mieux la graver
dans ma mémoire.
La femme
imaginée..